LES PETROLES,

des hydrocarbures jusqu'en C 40, au moins.


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1) Origine – Composition – Distillation fractionnée :

Les pétroles sont des mélanges complexes d'hydrocarbures qui se sont formés par fermentation de matières organiques et décomposition de microorganismes marins enfouis il y a plusieurs centaines de millions d'années et qui ont été soumis aux effets combinés de la température, de la pression et à l'action de bactéries. Les hydrocarbures formés ont été maintenus sous des couches de roches imperméables et ont imbibé une roche appelée "roche magasin".

Les pétroles bruts se présentent sous forme d'une huile très visqueuse, de couleur foncée à reflets marron ou vert sombre et à odeur variable mais le plus souvent désagréable.

Leur composition varie suivant leur provenance : ceux du Moyen- Orient, du Sahara, de Pennsylvanie pour ne citer qu'eux, sont formés essentiellement d'alcanes, ceux du Texas de cyclo-alcanes ; ceux du Caucase et d'Indonésie de cyclo-alcanes et de carbures aromatiques.

Ils subissent un premier traitement qui est une distillation fractionnée permettant de recueillir des groupes de composés (groupes appelés "coupes pétrolières") dont les points d'ébullition se situent dans un intervalle donné.

Le résultat de ce fractionnement permet d'avoir un aperçu de la composition d'un pétrole, des températures d'ébullition des composés obtenus dans une coupe, ainsi que l'ordre de grandeur de leurs quantités respectives.

 

Températures auxquelles les fractions sont recueillies

Fractions recueillies

Types d'hydrocarbures présents dans ces fractions.

Quantités en % en masse.

Jusqu'à 40°C

Fractions légères (gaz)

Alcanes linéaires ou ramifiés de C1 à C4.

Gaz naturels : méthane et éthane

Gaz livrés en bouteilles ou en tubes : propane et butane.

Gaz de pétrole liquéfié (GPL) servant de carburant ; c'est un mélange de propane et de butane.

1 à 2%

40-180°C

Essences

Hydrocarbures de C5(*) à C10

Plus de 100 composés ont été répertoriés (linéaires et ramifiés, cycliques et aromatiques) : alcanes, cycloalcanes et arènes

15 à 30%

180°C-230°C

Kérosène

Hydrocarbures de C11 à C12

Carburant utilisé dans les réacteurs d'avions.

Une partie de cette fraction qui n'est pas utilisée en tant que carburant est "craquée" en alcanes et alcènes plus simples.

5 à 10%

230°C à 305°C

Gas-oil légers et fuels légers.

Hydrocarbures de C13 à C17

Utilisés comme carburant des moteurs diesel et comme combustible dans les chaudières domestiques

5 à 10%

305°C à 405°C

Fuels lourds et lubrifiants légers (huiles)

Hydrocarbures de C18 à C25.

Les fuels lourds sont après traitement, utilisés comme carburant dans les gros moteurs diesel lents et très puissants (bateaux) ou comme combustibles (centrales thermiques ou fours de cimenteries) ; ce sont des produits à forte viscosité qui doivent être réchauffés avant utilisation et de densité voisine de 0,920 à 15°C. La densité est une caractéristique importante ; elle doit être la plus faible possible pour permettre une décantation rapide de l'eau qui accompagne le fuel et qui est l'un des traitements qu'on doit lui faire subir avant utilisation.

Les huiles sont paradoxalement appelées huiles minérales (pour rappeler leur provenance du sous-sol) mais sont bien des produits organiques puisque constituées de mélanges d'hydrocarbures. Elles sont essentiellement utilisées comme lubrifiants des organes mécaniques des moteurs et machines diverses. Il ne faut pas les confondre avec les huiles de synthèse utilisées aussi comme lubrifiants des moteurs et qui appartiennent à diverses familles chimiques.

10 à 30%

405°C à 515°C

Paraffines et vaseline

Hydrocarbures de C26 à C38

Les paraffines se présentent sous forme d'un solide blanc plus ou moins transparent, inodore dont le point de fusion se situe suivant leur composition entre 35°C et 70°C. Elles constituent un agent d'enrobage (fruits, confiseries) classé additif alimentaire E905.

La vaseline est une substance grasse, molle, incolore, insoluble dans l'eau, utilisée comme lubrifiant et entrant dans la composition des pommades.

Environ 10%

Résidus de distillation

Bitumes

Hydrocarbures de C39 à C40

Ce sont des substances totalement imperméables à l'eau et ayant un fort pouvoir adhésif. Les bitumes servent à fabriquer des enrobés répandus sur les chaussées routières (ils sont alors associés à des granulats et portent le nom d'asphalte) mais aussi à réaliser des chapes d'étanchéité sur les toitures des bâtiments ou dans les bassins de rétention.

Environ 15%

(*) Les trois hydrocarbures saturés en C 5 ont respectivement pour point d'ébullition :

            - Le pentane                             36,10°C

            - Le 2-méthylbutane :                27,88°C

            - Le 2,2-diméthylpropane          9,48°C

Ils devraient en toute rigueur être classés dans la première coupe obtenue (fraction recueillie jusqu'à 40°C) ; en fait on en recueille effectivement une partie dans la première coupe, mais on en recueille aussi (en solution dans les autres hydrocarbures) dans la deuxième coupe, celle des essences. Traditionnellement on dit que le pentane est l'hydrocarbure saturé à la plus faible masse molaire constituant les essences.

Remarque : Au-delà de 400°C les fractions recueillies sont redistillées sous pression réduite ce qui permet un abaissement des points d'ébullition.

 

2) La désulfuration des produits pétroliers :

Les pétroles bruts contiennent en moyenne entre 1,5 et 2,5% de soufre.

Il convient de réduire ce taux dans les carburants et les combustibles afin d'éviter que le rejet du soufre dans l'atmosphère sous forme d'oxydes (essentiellement SO2) n'engendre des pollutions telles que les pluies acides. De plus le soufre est un poison des catalyseurs utilisés dans les pots catalytiques d'échappements (automobiles) mais aussi dans les opérations de raffinage.

La législation européenne évolue et devient de plus en plus draconienne en la matière ; ainsi en 1994 la limite tolérée était de 1g par kg d'essence et 2g par kg de gas-oil ; après des baisses successives elle est passée à 10mg par kg pour les deux types de carburant.

Le soufre est présent sous forme organique solubilisée, essentiellement des composés thiocycliques (thiophène, benzothiophène ou dibenzothiophène) plus ou moins alkylés et des mercaptans (thiols) :

 

Thiophène

Benzothiophène (ou thianaphtène)

Dibenzothiophène

Mercaptans

THIOPHENE.gif

BENZOTHIOPHENE.gif

DIBENZOTHIOPHENE.gif

R-SH

 

·         Le procédé le plus classique de désulfuration, consiste à traiter le produit à désulfurer par de l'hydrogène à haute température (>300°C) et à des pressions de plusieurs dizaines voire plusieurs centaines de bars (ainsi pour le gas-oil il faut chauffer à 370°C sous une pression de 60 bars) en présence de catalyseurs, des oxydes métalliques (principaux métaux : Mo, Co, Ni, Pt, W, Pd) finement répartis dans de l'alumine.

Les produits soufrés sont dans ces conditions transformés en sulfure d'hydrogène (H2S) un gaz qui constitue une source de soufre. Ce procédé est appelé hydrodésulfuration abrégé en HDS.

 

·         Pour les kérosènes, les gaz livrés en bouteilles ou le GPL, la désulfuration  consiste à leur enlever les thiols (RSH) qu'ils contiennent, qui leur donne une odeur nauséabonde et les rend corrosifs. Pour cela on les traite par de la soude ; les thiols se transforment en thiolates (RSH → RS- ) qui conduisent à des disulfures (R-S-S-R) que l'on élimine par décantation aqueuse. Cette opération s'appelle l'adoucissement.

 

·         Des techniques de désulfuration microbiologiques ont été étudiées, utilisant la souche Rhodococcus erythropolis IGTS8 (ATCC n° 53968) ou d'autres, voisines ; cette souche est capable d'enlever le soufre du dibenzothiophène en aérobiose par oxydation spécifique du soufre selon une voie métabolique dénommée voie des 4S ou voie Dsz et l'on aboutit à du 2-hydroxydiphényle et des ions sulfites.

 

PETROLESMICROBIO.gif

 

3) Craquage (terme anglais "cracking") :

Les coupes obtenues lors du fractionnement des pétroles bruts ne correspondent pas, en général, à la demande. Il y a souvent un excédent de fractions lourdes et les fractions légères sont produites en quantités insuffisantes. On fait donc subir aux fractions lourdes (fuels lourds …) des traitements conduisant à la rupture des longues chaînes carbonées et à la formation de chaînes plus courtes (essences). C'est ce que l'on appelle le craquage. On parvient à ce résultat par chauffage en présence d'un catalyseur (craquage catalytique) ou par chauffage en présence de vapeur d'eau (vapocraquage) ou encore par chauffage en présence d'hydrogène (hydrocraquage).

On peut traduire ces opérations en équations en les appliquant à de petites molécules pour la clarté de l'exposé :

            - Craquage catalytique : Les catalyseurs utilisés sont de type zéolithe (aluminosilicates) cristallisé.

 

CRAQUAGE1.gif

La rupture de la chaîne ne se produit pas obligatoirement entre C4 et C5 comme dans l'exemple que nous avons choisi, mais peut se produire entre C1 et C2 ou entre C2 et C3 ou encore entre C3 et C4.

D'une façon générale on peut écrire :

CRAQUAGE2.gif

avec x = y + y'

On obtient un mélange d'alcanes et d'alcènes constituant une essence.

 

            - Vapocraquage :

C'est un craquage thermique mais, en pratique, on fait agir de la vapeur d'eau, dont la pression contribue de façon appréciable à la pression totale de l'opération. L'expérience montre que ce craquage thermique donne beaucoup de gaz. C'est pourquoi on en est venu plutôt à un craquage catalytique pour avoir de l'essence.

Avec un alcane léger on peut en outre avoir formation de deux alcènes :

CRAQUAGE3.gif

Les alcènes sont source de très nombreuses synthèses et sont à la base d'une florissante pétrochimie.

            - Hydrocraquage :

Lors de la désulfuration par le procédé HDS, il peut se produire un craquage.

 

4) Reformage (terme anglais "reforming") :

 

C'est une opération qui s'adresse habituellement aux essences ; elle permet d'améliorer leur indice d'octane c'est-à-dire leur qualité en temps que carburant, en augmentant leur pouvoir antidétonant, c'est-à-dire leur résistance à l'auto-inflammation par compression ; Les chaînes linéaires sont ramifiées ou cyclisées, la cyclisation supposant une déshydrogénation.

           

4-1) Isomérisation :

 

A 500°C , sous pression et en présence de platine, les chaînes linéaires se ramifient :

REFORMING1.gif

            4-2) Cyclisation :

 

Les chaînes linéaires se cyclisent et conduisent à des cycloalcanes :

CRAQUAGE4.gif

 

           

            4-3) Déhydrocyclisation :

 

Un alcane perd de l'hydrogène et se cyclise pour donner un composé aromatique :

Craquage8.gif

 

5) Les débuts de l'industrie pétrolière :

 

Le premier forage pétrolier a lieu à Titusville en Pennsylvanie en août 1859 par l'américain Edwin L. Drake. Le pétrole affleure alors presque le sol, puisque la profondeur du puits est de 23m. Ce premier forage marque le début de l'exploitation industrielle du pétrole.

C'est aussi dans cette région qu'est implantée la première raffinerie des Etats-Unis. Le saviez-vous : au tout début le raffinage est seulement destiné à recueillir le pétrole pour lampes d'éclairage (pétrole lampant), le reste étant réinjecté dans le sol.

 

6) Et maintenant des "algo-pétroles" :

Des recherches sont menées au niveau des micro-algues pour développer des filières de production de biomasse et de biocarburant.

Les micro-algues sont des organismes photosynthétiques unicellulaires intéressants car en capturant le dioxyde de carbone et grâce à la lumière elles croissent rapidement et produisent des métabolites intéressants tels que polysaccharides, pigments et lipides.

Leurs atouts par rapport aux plantes supérieures est d'avoir un rendement supérieur (en métabolites transformables en biocarburant), de ne pas être en compétition avec la production alimentaire ; de plus elles sont très diverses et s'adaptent facilement à plusieurs milieux.

Leurs constituants polysaccharidiques permettraient la production de bioéthanol ou de biogaz et leurs constituants lipidiques les bio-fuels ou biodiesels. On a calculé que la production de carburants à partir de micro-algues pourrait représenter 20000 à 60000 litres d'huile par hectare, par an, contre 6000 litres d'huile de palme, un des meilleurs rendements terrestres.

On donne parfois à ces carburants le nom d'algo-carburants.