MONOLIGNOLS-LIGNANES-LIGNINES
Gérard
Gomez
Plan
de l'étude
:
2)
Les lignanes
2-1) Définition
et biosynthèse
2-2) Quelques
lignanes
2-2-1) Les lignanes dibenzylbutanes
2-2-2)
Les lignanes monofuraniques
2-2-3)
Les lignanes butyrolactones
2-2-4)
Les aryltétralines et les arylnaphtalènes
2-2-5)
Les dibenzocyclooctanes
2-2-6)
Les lignanes furanofuraniques
2-3) Voies de biosynthèse des entérolignanes
3) Les lignines
1)
Les monolignols :
Ce
sont des composés précurseurs de la lignine, un constituant important de la
paroi cellulaire des végétaux dont nous donnerons la structure plus loin dans
cet exposé.
Ce
sont des dérivés de l'alcool cinnamique :
Les
trois monolignols les plus importants sont :
- L'alcool p.coumarylique :
- L'alcool coniférylique :
- L'alcool sinapylique :
Les
étapes biochimiques qui conduisent dans la nature aux monolignols à partir de
la phénylalanine :
sont
les suivantes :
¾ Désamination
de la molécule avec formation d'une double liaison
¾ Hydroxylation
du cycle benzénique en position para de la chaîne latérale
¾ Thioestérification
du groupe carboxyle par le coenzyme
A avec formation du p-coumaroyl-CoA :
¾ Réduction
de la fonction thioester en aldéhyde (grâce à l'enzyme cinnamoyl-CoA réductase
: CCR) puis en alcool (par l'enzyme cinnamylalcool déshydrogénase : CAD), on
obtient
l'alcool
p.coumarylique
¾ Par
introduction d'un ou deux groupements méthoxyle, on obtient
l'alcool
coniférylique
et
l'alcool sinapylique
Remarque : D'un point de vue structural on voit
que ces monolignols qui sont, comme nous l'avons dit, des dérivés de l'alcool
cinnamique, ont en commun un squelette 1-phénylpropane :
2-1) Définition et biosynthèse :
Ce sont des composés naturels dont la molécule dérive de deux
unités monolignols.
C'est Haworth qui introduit le premier en 1936 le terme de
lignane pour désigner un ensemble de deux molécules ayant un squelette
phénylpropane, liées par leurs carbones 8 et 8'.
Ce terme a été étendu par la suite (Otto Richard Gottlieb
1972) aux groupes de deux molécules ayant un squelette phénylpropane mais non
liées par leurs carbones 8 et 8' ; il les a qualifiées de néolignanes.
Prenons comme exemple le pinorésinol
(C20H22O6) qui dérive de deux molécules
d'alcool coniférylique :
Sa biosynthèse peut se résumer ainsi :
La protéine qui oriente la stéréochimie, appelée protéine
directrice (Dirigent Protein en anglais ou DP) est une autre protéine que
l'enzyme qui catalyse la réaction. En son absence, il se forme également, après
création des radicaux, du (-)-pinorésinol, de l'alcool (±)déhydroconiférylique
et des éthers alcools en quantité comparable à celle du (+)-pinorésinol, alors
qu'en sa présence ces composés se forment en très petite quantité.
Les lignanes sont assez répandus mais ce sont les graines de
sésame et de lin qui en contiennent le plus :
Sésame |
1000 à 2000 µg/g |
Lin |
347 à 1140 µg/g |
Carotte |
29,3 µg/g |
Lentille |
19,6 µg/g |
Chou-fleur |
16,2 µg/g |
Ail |
10,5 µg/g |
Oignon |
10,3 µg/g |
Arboréol - Arctigénine
– Calopiptine - Chinensine
– Dibenzylbutyrolactol - Entérodiol - Entérolactone - Globoidnane A
- Gmélanone - Gmélinol - Gummadiol - Isolaricirésinol
– Isootobanone - Laricirésinol
– Macélignane - Matairésinol
- Pinorésinol – Podophyllotoxine
– Secoisolaricirésinol - Sésamine
- Stéganacine
On peut classer les lignanes en six groupes :
2-2-1) Les lignanes dibenzylbutanes de structure
générale
Exemples :
¾ le macélignane : (C20H24O4)
Molécule qu'on trouve par exemple dans la noix muscade (Myristica
fragrans).
Elle a des propriétés antimicrobiennes et se révèle active
contre les caries dentaires notamment dues à Streptococcus mutans.
¾ L'entérodiol :
(C18H22O4)
Un
lignane qui se forme dans l'intestin (d'où son nom) ; on le qualifie aussi de lignane
mammalien car se formant dans l'organisme des mammifères. C'est un catabolite
produit par la flore intestinale à partir de lignanes présents dans la
nourriture tels que le sécoisolaricirésinol, le matairésinol, le pinorésinol, le laricirésinol, la sésamine….
L'entérodiol
est un phytoestrogène c'est-à-dire un nutriment d'origine végétale (puisque
formé à partir de lignanes végétaux) de structure non stéroïdienne capable de
se fixer sur le récepteur des oestrogènes.
L'entérodiol
peut être converti en entérolactone sous l'effet de bactéries présentes dans l'intestin.
¾ Secoisolaricirésinol (C20H26O6)
Son diglucoside, un anti-oxydant isolé des graines de lin,
est métabolisé dans le corps humain, en secoisolaricirésinol,
mais aussi en entérodiol et en entérolactone, des
lignanes dits mammaliens, ayant des propriétés de phytoestrogènes :
2-2-2) Les lignanes monofuraniques :
Il en existe de trois types :
Exemples :
¾ le dibenzylbutyrolactol (C23H28O6),
un lignane monofuranique 9-O-9'.
Molécule présente dans Aristolochia peltato-deltoidea une
plante que l'on trouve notamment au Brésil.
¾ le laricirésinol (C20H24O6),
un lignane monofuranique 7-O-9'.
On en trouve dans le sésame et les légumes du type Brassica
(Crucifères).
C'est un composé de référence dans la purification,
l'identification et l'analyse des lignanes phytoestrogènes et des lignanes
hétérosides.
Son catabolisme dans l'intestin (action de la flore colique)
conduit à l'entérolactone, un lignane mammalien.
¾ La calopiptine : (C21H24O5),
un lignane monofuranique 7-O-7'.
Cette molécule est présente dans Magnolia acuminata, Piptocalyx
moorei, Sacoglottis gabonensis.
2-2-3) Les lignanes butyrolactones :
Leur structure :
ou présenté autrement
Exemples :
¾ Entérolactone :
(C18H18O4)
Un lignane qui se forme dans l'intestin (d'où son nom) ; on
le qualifie aussi de lignane mammalien car se formant dans l'organisme des mammifères.
C'est un catabolite produit par la flore intestinale à partir de lignanes
présents dans la nourriture tels que le sécoisolaricirésinol,
le matairésinol, le pinorésinol,
le laricirésinol, la sésamine
qui conduisent à l'entérodiol converti en entérolactone
sous l'effet de bactéries présentes dans l'intestin ….
L'entérolactone est un phytoestrogène c'est-à-dire un
nutriment d'origine végétale (puisque formé à partir de lignanes végétaux) de
structure non stéroïdienne capable de se fixer sur le récepteur des
oestrogènes.
¾ Matairésinol (C20H22O6)
Lignane
assez fréquent ; on en trouve dans les graines de lin et de sésame, dans divers
légumes et fruits.
C'est
un précurseur des lignanes mammaliens (entérodiol et entérolactone).
¾
L'Arctigénine (C21H24O6)
C'est un lignane que l'on trouve dans certaines plantes de la
famille des Asteracea comme la grande Bardane (Arctium lappa L.).
Cette molécule a montré une action anticancer in vivo.
Elle est l'aglycone de l'arctiin :
qui possède les mêmes propriétés anticancer.
2-2-4) Les aryltétralines et les arylnaphtalènes :
Pour les aryltétralines, deux structures :
ou
présenté autrement
Structure des arylnaphtalènes :
Exemples :
¾
L'isolaricirésinol (C20H24O6)
Un lignane de structure aryltétraline.
Le 9'-rhamnopyranoside de ce lignane est l'aviculine,
un produit naturel extrait de Polygonum aviculare une
plante médicinale fréquemment employée en médecine traditionnelle coréenne.
¾
L'isootobanone (C20H18O5)
Molécule de structure aryltétraline, présente dans le bois de
cœur du cyprès du Japon (Chamaecyparis obtusa).
¾
La podophyllotoxine (C22H22O8)
Cette molécule, de structure aryltétraline, existe dans le
rhizomes et les racines de certaines espèces de Podophyllum comme Podophyllum
hexandrum par exemple que l'on trouve en Inde, en Chine ou dans l'Himalaya.
Elle a des propriétés antitumorales en particulier contre les
condylomes.
¾
Chinensine (C21H16O6)
Un lignane de structure arylnaphtalène présent dans Polygala
chinensis et Bupleurum frutiscens.
¾ Globoidnane A (C26H20O10)
Lignane de structure arylnaphtalène présent dans Eucalyptus
globoidea un arbre originaire d'Australie.
Cette molécule inhibe l'action de l'enzyme HIV intégrase
responsable de l'introduction de l'ADN viral dans l'ADN d'une cellule hôte.
2-2-5) Les dibenzocyclooctanes :
Structure :
Exemples :
¾
La (-)-stéganacine (C24H24O9)
Cette molécule qui a in vitro des propriétés
antimitotiques, est un antileucémique ; elle a été isolée de la steganataenia
arcaliacea, une plante à fleurs que l'on trouve dans de nombreux pays
d'Afrique équatoriale et que l'on appelle aussi "l'arbre à carottes"
car lorsqu'on froisse ses feuilles il se dégage une odeur de carotte.
¾
Gomisine A (C23H28O7)
Molécule ayant une activité vasodilatatrice.
On la trouve dans Schisandra chinensis, une liane
arborescente caduque originaire du Nord-Est de la Chine et de la Mongolie.
2-2-6) Les lignanes furanofuraniques :
Structure :
Exemples :
¾
L'arboréol (C20H18O8)
qui se transforme par catalyse acide en Gmélanone.
¾
Le Gmélinol (C20H26O7)
qu'on trouve à l'état naturel dans Gmelina arborea
comme la Gmélanone et qui possède des propriétés
antifongiques notamment contre Trametes versicolor.
¾
Gummadiol ( C20H18O8)
Lignane présent à l'état naturel dans Gmelina arborea.
¾
La sésamine (C20H18O6)
présente dans l'huile de sésame.
Sa dégradation dans l'organisme humain conduit à l'entérolactone un lignane mammalien ayant des
propriétés de phytoestrogène.
¾
Le pinorésinol (C20H22O6)
qui dérive de deux molécules d'alcool coniférylique :
On trouve le pinorésinol notamment dans les graines de
sésame, mais aussi dans l'huile d'olive, le styrax (arbuste dont la résine
constitue le benjoin) ou encore dans Forsythia suspensa.
Sa dégradation dans l'organisme humain conduit à l'entérolactone un lignane mammalien, ayant des
propriétés de phytoestrogène.
¾
La Gmélanone (C20H16O7)
Ce lignane se trouve à l'état naturel dans Gmelina arborea
(Inde, Thaïlande, Laos, Cambodge, Vietnam ….).
2-3) Voies de biosynthèse des entérolignanes :
Les entérolignanes ou lignanes mammaliens (essentiellement
l'entérodiol et l'entérolactone), se forment dans l'organisme humain par
dégradation de lignanes d'origine végétale apportés par la nourriture,
essentiellement le pinorésinol et le matairésinol (que l'on désigne de ce fait
par lignanes précurseurs des entérolignanes), dans l'intestin, par action
d'enzymes bactériennes.
Parmi les voies de biosynthèse connues on trouve celles
répertoriées ci-dessous ; les principales enzymes qui interviennent sont citées
près des flèches des réactions :
Avec la cellulose et les hémicelluloses, les lignines
constituent le troisième type de polymères présents dans les végétaux.
Leur structure, complexe, varie en fonction de l'espèce, de
l'âge du végétal et des conditions climatiques.
Les lignines sont des polymères réticulés (structure
tridimensionnelle) formé à partir des monolignols.
En fonction de la nature des végétaux, on peut dégager une
structure de base des monolignols mis en jeu :
- Pour les
plantes annuelles :
c'est-à-dire plutôt des dérivés de l'alcool coumarylique.
- Pour les
résineux :
c'est-à-dire plutôt des dérivés de l'alcool coniféryliques.
- Pour les
feuillus :
c'est-à-dire plutôt des dérivés de l'alcool sinapylique.
La représentation ci-dessous donne un modèle de la structure
de lignine de pin, d'après Adler (1977) :
Insistons sur le fait que la représentation ci-dessus n'est
qu'un modèle statistique issu de données analytiques fragmentaires pour le pin
; on ne peut en effet considérer la structure de ce polymère comme résultant de
la répétition régulière d'un motif.
La lignine agit comme un ciment entre les fibres du bois et
comme élément rigidifiant à l'intérieur des fibres.
Les lignines de feuillus ayant plus de groupements méthoxy, présentent moins de
liaisons intermoléculaires (liaisons hydrogène) et sont par conséquent plus
facilement dissoutes.