LES COULEURS DES
PAPILLONS
Gérard GOMEZ
avec la collaboration de
Jacques BARON
Plan de
l'étude :
1) Importance des couleurs chez les
papillons :
2) Pigments et couleurs structurelles :
2-1) Les
pigments
¾
Ptérines
·
Ommochromes
et papiliochromes
2-2) Les couleurs structurelles
2-2-1) Interférences
sur lame mince
2-2-2) Interférences
par réflexion sur un réseau
2-2-3) Structure
des ailes de papillon
Annexe 1
La chitine
Annexe 2
Miroirs de Bragg
Annexe 3
Biosynthèse des mélanines
Annexe 4
Ommochromes et papiliochromes à partir du tryptophane
Annexe 5
Cristal photonique – Architecture photonique polycristalline
|
|
Face dorsale |
Face ventrale |
|
Calledapteryx
dryopterata |
Aglais io |
Gonepteryx rhamni |
Cyanophrys remus |
Cyanophrys remus |
|
Face dorsale |
Face ventrale |
|
|
Danaus plexippus |
Morpho menelaus didius |
Morpho menelaus didius (Photo Didier
Descouens) |
Limenitis reducta |
|
|
|
|
|
|
Biston betularia ("carbonaria") |
Biston betularia
("typica") |
Morpho Cypritis Rhetenor |
Pieris brassicae |
Les
couleurs des papillons, ailes déployées, sont souvent dues à l'existence d'un ou
plusieurs pigments ; elles ont alors une origine chimique. Mais pour certaines
d'entre elles la cause est purement physique : interférences lumineuses,
diffraction. Parfois aussi les deux se combinent, on trouve à la fois des
pigments et une origine physique due à un phénomène lumineux.
Ces
couleurs ne sont pas purement décoratives, elles sont le fruit d'une longue
évolution et permettent la survie de nombreuses espèces ; ainsi elles servent :
- de camouflage pour se
fondre avec l'environnement et ne pas attirer l'attention du prédateur ; c'est
le cas de Calledapteryx dryopterata que l'on
distingue difficilement d'une feuille sèche (on dit qu'il est cryptique).
- à créer la surprise : certains ont des couleurs ternes, en
apparence, lorsqu'ils sont repliés au repos qui leur permettent de se camoufler
; en cas de danger ils déploient très rapidement leurs ailes qui sont colorées
très vivement sur la face extérieure et le prédateur est surpris ce qui donne
le temps au papillon de s'enfuir ; d'autres ont des ocelles, des taches
arrondies sur les ailes qui ressemblent à des yeux de mammifères ce qui là
encore surprend le prédateur ; c'est le cas par exemple de Aglais io, le paon-du-jour
- à se faire voir très
nettement
Ø
des femelles qui semblent préférer les
mâles aux couleurs flamboyantes, mais la coloration de la femelle est aussi
importante car elle permet au mâle de la reconnaître.
Ø
des prédateurs en les avertissant
qu'il est non consommable car toxique ; c'est le cas de Danaus plexippus,le
monarque.
- à absorber de la chaleur :
ce sont des animaux poïkilothermes (animaux dits "à sang froid") qui
contrôlent la température de leur corps grâce à des moyens externes par exemple
en se mettant au soleil. Dans les régions d'altitude ou dans les régions
polaires ils ont besoin de plus de chaleur ; ce sont donc les papillons aux
couleurs plus foncées qui prédominent, ces couleurs absorbant davantage la
chaleur que les couleurs claires ; c'est le cas de Limenitis
reducta, le Sylvain azuré.
2) Pigments et couleurs structurelles :
2-1) Les pigments
:
Les
pigments présents dans les ailes de papillons sont essentiellement des
mélanines et des ptérines ; on envisagera aussi quelques autres pigments que
l'on trouve moins fréquemment et pas dans toutes les espèces.
Ce sont
des pigments biologiques colorant les téguments chez les animaux.
Deux
mélanines, l'eumélanine et la phéomélanine, des macromolécules produites par
des cellules, les mélanocytes, par polymérisation d'un acide aminé, la tyrosine
en présence d'une enzyme la tyrosinase et de l'ion cuivre (voir détail des biosynthèses
dans l'annexe 3 ).
Eumélanine |
|
L'eumélanine
a une structure moléculaire en mosaïque comportant de très nombreuses doubles
liaisons. Une telle structure entraîne une absorption de toutes les radiations
du spectre visible. Il en résulte un composé de couleur noire.
La
phéomélanine est un pigment jaune orangé qui a pour origine la tyrosine et la
cystéine qui, par un processus analogue donnent une structure un peu
différente.
Les
mélanines sont à la base des couleurs noires, grises, et de la plupart des
beiges des bruns et des roux.
Exemple :
Le
phalène du bouleau (Biston betularia), un
papillon de nuit, existe sous deux formes une forme de couleur claire dite
"typica" et l'autre de couleur foncée dite "carbonaria" ou
"mélanique", ces variations de couleur étant dues à la quantité de
mélanine présente dans ses ailes et son corps.
Ce
papillon qui existe en majorité sous la forme foncée en zone industrialisée où
les bouleaux sont pollués par les fumées et la suie et en majorité sous la
forme claire dans les régions non industrielles ou désindustrialisées là où
cette pollution est moindre, a été un sujet d'étude scientifique dense donnant
lieu à des controverses sur les interprétations de ce phénomène.
Généralités :
Les ptérines font partie de la famille des ptéridines ; ce sont
des composés à noyaux hétérocycliques azotés parmi lesquels on trouve les
pigments des ailes de papillons ainsi que ceux des écailles de poissons mais où
on trouve aussi certaines coenzymes comme par exemple la vitamine B9 (ou acide
folique).
- La ptéridine
est une molécule dans laquelle la pyrimidine (1,3-diazine ou 1,3-diazabenzène)
et la pyrazine (1,4-diazine ou 1,4-diazabenzène) sont accolées :
numérotation des cycles :
-
Les ptéridines sont des composés possédant une molécule de
ptéridine ("noyau ptéridine") avec des substituants sur les carbones
de cette molécule. C'est le cas par exemple du lumichrome :
- La ptérine est
une ptéridine portant un groupement amine (NH2-) sur le carbone
numéro 2 et un groupement hydroxyle sur le carbone numéro 4 :
-
Les ptérines sont des composés possédant une molécule de ptérine
("noyau ptérine") avec des substituants sur les carbones de cette
molécule. C'est le cas par exemple de la leucoptérine :
On peut mettre en évidence des formes tautomères dans certaines de
ces formules.
La biosynthèse de ces composés se fait via la
6,7-diméthyl-lumazine
à partir de la guanosine triphosphate (GTP)
et du ribulose-5-phosphate
Les ptérines des ailes de papillon :
Ptérine – Xanthoptérine
– Isoxanthoptérine – Leucoptérine
- L-Sépiaptérine - Erythroptérine
ou 2-amino-4-hydroxyptéridine C6H5N5O Aspect : Cristaux jaunes, avec fluorescence dans le bleu à 360 nm. Masse molaire : 163,137 g.mol-1 Fusion : >360°C N° CAS : 2236-60-4 |
|
Son nom vient du grec Pteron,
aile. C'est un pigment jaune que l'on trouve dans les ailes de
certains papillons comme Gonepteryx rhamni par exemple ainsi que dans les yeux
et le tégument du papillon en formation. |
ou 2-amino-4,6-dihydroxyptéridine C6H5N5O2 Aspect : Substance amorphe jaune hygroscopique ou poudre orangée (si recristallisation
dans l'acide éthanoïque) avec fluorescence dans le jaune vert à 392 nm. Masse molaire : 179,137 g.mol-1 Fusion : >410°C (se décompose) Ebullition : 99°C (sous 18 mm de Hg) Densité : 1,559 (à 25°C) N° CAS : 119-44-8 Solubilité : Très soluble dans les acides et les bases alcalines ; soluble
dans l'éthanol ; insoluble dans l'eau. |
|
C'est aussi un pigment jaune (comme son nom l'indique) des ailes
de papillons (et de différents insectes). La xanthoptérine a été isolée et identifiée pour la première
fois des ailes de Gonepteryx rhamni. La xanthoptérine serait un précurseur de la leucoptérine. |
ou 2-amino-4,7-dihydroxyptéridine C6H5N5O2 Masse molaire : 179,137 g.mol-1 Ebullition : 828,8°C Densité : 2,45 N° CAS : 492-11-5 |
|
Substance incolore avec fluorescence dans le violet (339 nm) qui
est surtout présente dans les ailes de certains papillons mâles (famille des Pieridae papillons diurnes ; 24
espèces connues en France). |
ou 2-amino-4,6,7-trihydroxyptéridine C6H5N5O3 Aspect : Composé incolore avec fluorescence dans le bleu pâle à 345 nm. Masse molaire : 195,136 g.mol-1 Densité : 2,45 Ebullition : 828,8°C N° CAS : 492-11-5 |
|
Constitue la couleur blanche des ailes de papillons (Pieris brassicae, la Piéride du chou). C'est la
première ptérine qui a été isolée et identifiée (Gonepteryx rhamni). |
ou 6-lactoyl-7,8-dihydroptérine C9H11N5O3 Aspect : Poudre ou cristaux jaunes avec fluorescence dans le jaune-orangé
à 268 nm. Masse molaire : 237,215 g.mol-1 N° CAS : 17094-01-8 |
|
Pigment à l'origine de la couleur rouge chez certains poissons.
(exemple Betta splendens).Cette
ptérine a été retrouvée (non comme pigment mais comme composé biologiquement
actif) dans certains papillons dont les ailes présentaient des anomalies. |
ou 2-amino-3,4,5,6-tétrahydro-4,6-dioxoptéridine-7-acide pyruvique. C9H7N5O5 Aspect : microcristaux rouges (λmax(à pH=1,0) = 450 nm) avec
fluorescence dans l'orangé entre 254 et 365 nm. Masse molaire : 265,18 g.mol-1 Densité : 2,16 N° CAS : 7449-03-8 |
|
Pigment responsable de la couleur rouge orangé ou jaune des
ailes de certaines espèces de papillons. Cette molécule a aussi été détectée
dans les téguments d'autres insectes. |
Comme on le voit, les ptérines sont à la base des rouges, oranges
et jaunes, mais elles sont susceptibles lorsqu'elles sont soumises à des
radiations ultra-violettes de donner des couleurs fluorescentes :
- Ptérine :
fluorescence dans le bleu
- Xanthoptérine :
dans le jaune vert
-
Isoxanthoptérine : dans le violet
- leucoptérine :
dans le bleu pâle
- L-Sépiaptérine
: dans le jaune-orangé
- Erythroptérine
: dans l'orangé.
·
Ommochromes
et papiliochromes :
On les trouve plus rarement dans les ailes de papillon. Ce sont
des métabolites du tryptophane (voir annexe 4)
v
Ommochromes : il s'agit
d'une famille de pigments jaunes à rouge violet solubles dans les acides et que
l'on trouve surtout dans les yeux d'insectes à ommatidies (yeux à facettes).
Ils dérivent du tryptophane :
via la S-cynurénine :
et la 3-hydroxycynurénine :
On connaît actuellement trois groupes
d'ommochromes : les ommatines, les ommines et les ommidines.
Un exemple d'ommatine :
la xanthommatine de couleur jaune brun :
On connaît aussi, la rhodommatine de
couleur rouge et l'ommatine D de couleur brun rouge.
v Les papiliochromes ou papillochromes : Il s'agit
d'une famille obtenue à partir de la cynurénine, de la dopamine et de la dopa.
Un exemple :
Le papiliochrome II, est un pigment jaune :
On trouve aussi des pigments biliaires isomères de la biliverdine
:
|
ou |
|
Ce sont la ptérobiline, la phorcabiline et la sarpédobiline :
ou |
|
|
Ptérobiline |
Phorcabiline |
Sarpédobiline |
2-2) Les couleurs structurelles
:
La
couleur des ailes de papillon quand elle n'est pas due à des pigments provient
d'un phénomène lumineux appelé iridescence : la couleur observée dépend de
l'angle d'observation.
2-2-1) Interférences sur lame mince :
- C'est ce qu'on observe par exemple
à la surface d'une bulle de savon ou à la surface d'un mince film d'huile
déposé sur de l'eau.
|
La
lumière blanche est produite par des sources vibrant à des fréquences variant
entre 790 THz (1 THz =1012 Hz) et 385 THz ; ces vibrations se propagent,
formant des ondes qui dans l'air ont des longueurs d'onde (λ) variant
entre 380 nm (1 nm = 10-9 m) et 780 nm. L'ensemble
de ces ondes superposées forme la lumière visible ; elle est blanche pour
l'humain qui la reçoit. A chaque
fréquence de la source, donc à chaque longueur d'onde émise, correspond une
couleur ; ainsi, dans l'air, l'œil perçoit : |
Entre
380 et 430 nm |
Du
violet |
430 -
450 nm |
Indigo |
450 -
500 nm |
Bleu |
500 -
565 nm |
Vert |
565 -
590 nm |
Jaune |
590 -
625 nm |
Orangé |
625 -
780 nm |
Rouge |
Lorsque
la lumière blanche arrive à la surface d'une mince couche transparente d'eau
savonneuse constituant la bulle, une partie des ondes qui composent cette lumière,
se réfléchit sur le dioptre air-eau ; l'autre partie pénètre dans la couche, se
réfracte et, arrivée au dioptre eau-air, se réfléchit partiellement ou
totalement puis sort après une deuxième réfraction.
La
superposition de ces ondes provenant des deux réflexions constitue le phénomène
d'interférences. Suivant l'épaisseur de la couche de savon, il peut y avoir des
interférences constructives pour certaines longueurs d'onde et les couleurs
correspondantes en sortiront renforcées (les ondes qui interfèrent sont en
phase), ou au contraire des interférences destructives pour d'autres longueurs
d'onde et ces couleurs en sortiront diminuées ou même éteintes (les ondes sont
dans ce dernier cas en opposition de phase).
Ce
phénomène d'iridescence est dû ici à des interférences sur lame mince.
2-2-2) Interférences par réflexion sur un réseau :
- L'iridescence peut être due aux
interférences qui ont lieu lorsque la lumière se réfléchit sur un réseau.
|
Lorsqu'on
observe des surfaces striées très
finement et régulièrement (on appelle ce dispositif un réseau par réflexion)
on voit des irisations ; c'est le cas à la surface d'un CD ou d'un DVD :
plusieurs ondes sont réfléchies par une des faces des traits qui constituent
le réseau et interfèrent ; ces interférences sont constructives pour
certaines couleurs ou destructives pour d'autres, cela dépend de la longueur
de l'onde réfléchie (λ), de l'angle d'incidence (θ) et de la
distance entre deux traits successifs que l'on appelle le pas du réseau (d). |
2-2-3) Structure des ailes de papillon
Une
aile de papillon est formée de deux membranes qui se sont développées
indépendamment et qui s'accolent au moment de sa formation ; on distingue un
réseau de nervures bien visible par exemple dans Gonepteryx
rhamni ou dans Pieris brassicae et qui est caractéristique d'une espèce.
L'une
des membranes constitue la face ventrale de l'aile et l'autre la face dorsale.
On
trouve sur chaque partie (ventrale et dorsale), deux couches d'écailles
superposées constituées de chitine (voir annexe1) ; les
écailles du dessous sont dites écailles basales ou de fond tandis que celles du
dessus sont des écailles de recouvrement disposées comme les tuiles d'un toit.
|
-
Certaines de ces écailles à structure alvéolaire contiennent les pigments. -
D'autres construites autrement sont responsables des couleurs structurelles. |
Il est difficile
de donner un agencement de ces deux types d'écailles pour l'ensemble des
papillons car il dépend de l'espèce considérée.
On peut
cependant dire que dans la plupart des cas, la face ventrale a une couleur
pigmentaire et la face dorsale soit une couleur pigmentaire, soit une couleur
structurelle et parfois les deux
Exemple :
Morpho
menelaus didius,
sa face dorsale est iridescente et sa face ventrale pigmentaire.
Face dorsale |
Face ventrale (Photo Didier Descouens) |
Dans le
cas où la face dorsale est iridescente (couleur structurelle) ce sont la plupart
du temps les écailles de recouvrement exposées à la lumière et à la vue qui
sont structurées pour donner lieu à de la diffraction et des interférences
tandis que les écailles de fond jouent le rôle d'écran absorbant qui augmente
le contraste coloré ; elles sont donc des écailles pigmentaires.
On va
examiner plus en détails les choses en prenant comme exemple un papillon du
genre Morpho qui a été sans doute l'un des plus étudiés.
Ø
Les ailes des papillons Morpho
menelaus :
Ils ont
une belle iridescence bleue sur leur face dorsale. Contrairement à ce que nous
avons dit pour la majorité des cas, ces papillons ont des écailles de
recouvrement transparentes ou présentant une légère iridescence de type lame
mince et des écailles de fond formées d'un empilement de lamelles de chitine
placées à distance constante.
Les
planches ci-dessous font voir clairement la structure des écailles de fond :
D'après Saito et collaborateurs 2009 |
|
(a)
et (d) : Aile de Morpho menelaus didius sous deux angles différents. (b) :
Vue par microscopie électronique à balayage ; on distingue les lamelles de
chitine. (c) :
Vue en coupe suivant ligne rouge du (b) ; on distingue la structure et
l'empilement de ces lamelles. |
|
Dans
ces écailles de fond, les lamelles de chitine en surface constituent un réseau
par réflexion et cela explique pourquoi une couleur est privilégiée, le bleu
(480 nm). Mais l'empilement des couches de chitine alternant avec des couches
d'air, deux couches successives de chitine étant séparées d'1/4 de longueur
d'onde soit 120 nm, permet un renforcement de la couleur bleue et de la
brillance par réflexion coordonnée sur les différentes couches, par effet
comparable à celui d'un miroir de Bragg (voir annexe 2)
mais avec une première épaisseur de chitine
double des autres et avec des empilements de couches interdigitées, c'est-à-dire
des structures légèrement décalées les unes par rapport aux autres.
"Il
est facile de montrer que la couleur bleue n'est pas d'origine pigmentaire :
elle disparaît quand on plonge les ailes dans un liquide dont l'indice de
réfraction est proche de celui de la chitine (1,5 environ)" (Bernard Valeur – Les
couleurs des animaux – Conservatoire National des Arts et Métiers).
En
effet les écailles de chitine ayant le même indice de réfraction que le milieu
extérieur deviennent transparentes et ne forment plus des dioptres ; il n'y a
donc plus de réflexion sur ces dioptres et donc plus de réseau par réflexion.
Par
ailleurs, on aperçoit du noir sur le bord des ailes ; il est lui d'origine
pigmentaire et dû à de l'eumélanine.
Remarque
1 :
Le
nombre de couches de chitine dans Morpho rethenor est plus important que
dans Morpho didius ; cela conduit à un bleu plus intense et plus profond
:
|
|
Morpho didius |
Morpho rethenor |
Remarque
2 :
Cette
structure se rencontre aussi chez Cyanophrys remus dont la face dorsale
ressemble à celle de Morpho didius :
Mais
les choses sont plus compliquées pour ce papillon car la face ventrale est
iridescente, d'un vert terne :
Les physiciens
expliquent cette différence par une différence de structure ; alors que la face
dorsale a comme les deux morphos cités, une nanoarchitecture de chitine de type
cristal photonique, la face ventrale est moins bien organisée et possède une
nanoarchitecture de type photonique polycristalline (voir annexe
5).
Remarque
3 :
Pour
les Morphos seuls les mâles sont iridescents, les femelles sont colorées
par des pigments essentiellement mélaniques.
La chitine :
La cellulose constitue environ la moitié de la
biomasse (substances produites par la matière vivante) ; elle est suivie par la
chitine, autre polysaccharide que l'on trouve principalement chez les arthropodes
(insectes, arachnides, crustacés, ….) et les champlgnons.
La chitine est un polymère constitué d'enchaînements
de molécules N-acétyl-β-D-glucosamine
liées par liaison glycosidique 1->4 ; sa structure
est exactement celle de la cellulose mais le groupe hydroxyle (-OH) en 2 a été
remplacé par un groupe acétamido (-NH-CO-CH3).
On a étendu le nom de chitine aux enchaînements
mixtes, N-acétyl-b-D-glucosamine
et D-glucosamine si la proportion d'unités acétylées est supérieure à 50%.
Difficile à mettre en solution, la chitine peut difficilement être mise en
oeuvre donc valorisée directement.
Par contre le chitosane dérivant de la chitine par
désacétylation du groupe acétamido (un groupe amine -NH2 remplace le
groupe -NH-CO-CH3) trouve de nombreuses et importantes applications
dans les domaines de l'agriculture, la santé.... d'autant qu'il est
biodégradable grâce aux chitosanases et aux chitinases présents dans de
nombreuses cellules.
Miroirs
de Bragg :
Le
miroir de Bragg est une structure où alternent des couches de deux matières
d'indices de réfraction différents. A la surface d'un dioptre il se produit une
réflexion partielle. Si l'épaisseur des couches est λ/4, λ étant une
des longueurs d'onde constituant la lumière incidente, les réflexions se
combinent par interférences constructives et les couches ainsi empilées agissent
comme un excellent miroir (transmission de 99% de l'énergie incidente de l'onde
de longueur d'onde λ si le nombre de couches est suffisant).
Remarque
1 :
Il
existe dans la nature des animaux dont la chitine sur une partie du corps se comporte
comme un miroir de Bragg parfait avec réflexion spéculaire ; c'est le cas de la
mouche ci-dessous :
Remarque
2 :
Dans le
cas du Morpho ce n'est pas tout à fait le cas ; il y a bien réflexions
multiples interférences constructives et limitation des pertes d'énergie par un
système s'apparentant à un miroir de Bragg, mais le résultat n'est pas un
miroir. Il est vraisemblable que l'évolution de cet insecte et son mode de vie
ne nécessitait pas que le résultat soit un miroir.
Cristal photonique – Architecture photonique polycristalline
·
On appelle cristal
photonique une structure dont l'indice diélectrique varie périodiquement, à
l'échelle de la longueur d'onde, dans une ou plusieurs directions de l'espace.
L'exemple le plus simple de cristal photonique est celui d'un miroir de Bragg
(cristal photonique à une dimension) c'est-à-dire un empilement régulier de
couches d'indices différents. On a donné le nom de cristal pour rappeler
l'ordre qui règne dans l'agencement d'un monocristal minéral.
·
On appelle architecture photonique
polycristalline une structure formée de plusieurs cristaux photoniques ; cet
ensemble, moins bien ordonné qu'un cristal photonique unique est comparable aux
polycristaux minéraux.