LES CAOUTCHOUCS
4)
Les caoutchoucs
utilisés pour les pneumatiques
5)
Biosynthèses des 1,4-polyisoprènes
1) Découverte
- Les premières applications :
Les civilisations
précolombiennes d'Amérique s'intéressent déjà au "cahutchu"
("bois qui pleure" en indien).
Au milieu du
XVIIIème siècle (1747 précisément) un ingénieur français de Cayenne,
François Fresneau de la Gataudière (1703-1770), renseigné par Charles Marie de
La Condamine (1701-1774), scientifique français en mission géodésique en
Amérique, identifie l'arbre à caoutchouc (Ficus elastica).
Les premiers hévéas qui fournissent
le latex par saignée sont originaires du Brésil (Hevea
brasiliensis). Ils sont ensuite cultivés en Extrême-orient puis en
Afrique.
|
|
Les premières applications intéressantes
du latex, tiré de l'hévéa, datent de la deuxième moitié du XVIIIème
siècle (imperméabilisations des tissus, fabrication de tissus élastiques
comme les bretelles...).
|
2) Le caoutchouc naturel (désigné par le sigle NR (Natural Rubber)
Lorsqu'il coule de l'arbre, le latex
est un liquide laiteux composé de 2/3 d'eau et d'1/3 de caoutchouc. En
acidifiant ce liquide, le latex coagule libérant le caoutchouc solide qu'il
avait en suspension.
Le caoutchouc
ainsi récupéré est un solide blanc, un peu moins dense que l’eau, soluble
dans le benzène (C6H6), le tétrachlorométhane (CCl4).
Il se soude à
lui-même, à froid, par simple pression. A température inférieure à 5°C, il est
cassant; à température supérieure à 35°C, il se ramollit.Il est laminé et les
feuilles sont séchées par un courant d'air chaud, puis fumées au feu de bois
pour en assurer la conservation. On l'appelle alors "crêpe".
|
Remarque : On trouve du
latex aussi dans le guayule, une plante originaire du
Mexique et qui s'adapte bien sur le pourtour méditerranéen. Il ne coule pas
comme pour l'hévéa lorsqu'on incise le tronc. Pour l'extraire, il faut broyer
les branches dans l'écorce desquelles il se trouve. La particularité de ce
latex est d'être hypoallergénique, contrairement à celui produit par l'hévéa.
Signalons que ce n'est pas le latex qui produit des allergies, mais des
protéines produites par l'hévéa, qui se retrouvent dans le produit fini. Ces
protéines ne se trouvent pas dans le guayule et donc le caoutchouc qui en
résulte n'est pas allergisant. |
|
Les
caoutchoucs appartiennent à la famille des élastomères. Ce sont des substances
qui sous l'effet de la traction subissent un allongement important (seules sont
intéressantes celles dont les dimensions peuvent au moins tripler) qui cesse
quand l'action mécanique cesse.
Le caoutchouc naturel extrait du latex de l'hévéa est le polyisoprène,
l’isoprène étant le 2-méthylbutadiène :
Le motif du
caoutchouc naturel :
correspond à un enchaînement (Z) 1,4 de
l'isoprène :
Cette longue
chaîne est enroulée sur elle-même ; si l'on tire sur ses extrémités, elle se
déroule (à la manière d'un long cheveu frisé) et reprend sa forme quand cesse
la traction.
Le caoutchouc
naturel est ainsi formé de longues chaînes enchevêtrées. Comme il a été dit
plus haut, on peut parfaire son élasticité en y incorporant des "ponts
soufre" c'est à dire des atomes de soufre qui vont se lier par liaison
covalente à deux atomes de carbone appartenant à des chaînes adjacentes et ceci
grâce aux doubles liaisons résiduelles de la chaîne, qui vont s'ouvrir : c'est
la vulcanisation.
Cette opération
peut être menée :
- à chaud : on mélange du soufre (ou du sélénium ou du tellure) broyé
avec le caoutchouc et on porte l'ensemble à haute température (150-300°C) et à
forte pression (10 à 20 bars) ; c'est le procédé le plus courant.
- à froid : technique principalement utilisée pour les articles souples
et minces (gants, feuilles). On expose ces articles à du dichlorure de disoufre
(S2Cl2).
En incorporant
environ 3% de soufre et diverses charges (magnésie,craie,....) à du caoutchouc,
on lui conserve son élasticité à froid et à chaud ; en incorporant davantage de
soufre (30%), on obtient un produit dur et cassant, l’ébonite qui est un bon
isolant électrique.
Remarque :
Le (E)
1,4-polyisoprène appelé gutta-percha a des propriétés différentes du caoutchouc
naturel (plus dur et cassant). Contrairement à celui-ci qui a une structure
amorphe, le gutta-percha, du fait de son enchaînement (E), a une structure
semi-cristalline :
On le trouve
à l’état naturel dans la gomme d’un arbre de l’espèce Eucommia ulmoides appelé couramment « gutta-percha ».
3) Les
caoutchoucs synthétiques :
Les principales
dates qui jalonnent la production de ces polymères sont :
1879
Georges Bouchardat un chimiste français polymérise
l'isoprène.
1909 Fritz Hofmann l'imite en
Allemagne à partir du p.crésol extrait des
goudrons de houille.
1910 Matthews et Strange réalisent
l'initiation de la polymérisation du butadiène par du sodium (Natrium en
allemand) et obtiennent du BuNa (Butadiène-Natrium) ; le
produit obtenu a des propriétés très médiocres. Ils réaliseront des copolymères
à partir du butadiène et donneront quand même à ces matières le nom commercial
de Buna.
Puis suivent de
nombreuses polymérisations ou copolymérisations dont on peut avoir un aperçu
avec les quelques exemples suivants :
- A partir de l'isoprène :
La
polymérisation du 2-méthylbutadiène peut comme dans le caoutchouc naturel, se
faire par enchaînement (Z) 1,4 en utilisant du lithium métal finement divisé ou
des catalyseurs de type Ziegler (tétrachlorure de titane et trialkylaluminium).
Le produit obtenu n'a pas exactement les propriétés du caoutchouc naturel et
cela ne semble pas être dû aux chaînes du polymère mais à des éléments autres
qui existent dans le produit naturel et qui sont absents dans le produit
fabriqué.
- A partir du butadiène :
*
copolymérisation avec le styrène:
On obtient le
S.B.R. (Styrène Butadiène Rubber) utilisé pour la fabrication des pneus de
tourisme.
* copolymérisé
avec l’acrylonitrile :
On obtient le
caoutchouc nitrile particulièrement résistant à l’essence et à l’huile
(application: tuyaux d’essence).
Remarque : La polymérisation du butadiène seul donne un produit sans intérêt ; cependant lorsqu'il est mélangé à du caoutchouc naturel, à du polyisoprène de synthèse ou à du S.B.R., il sert à faire des pneus très résistants pour gros engins.
- A partir de l’isobutène :
copolymérisé
avec quelques % d’isoprène il donne le Butyl, particulièrement imperméable aux
gaz; application: chambres à air.
- A partir du chloroprène :
On obtient le
Néoprène....résistant aux frottements, au soleil,aux solvants ; ne propage pas
la flamme.
Application : gaines
électriques,courroies,combinaisons de plongée, pâtes élastiques pour
l’étanchéïté, colle (colle au néoprène).
4) Les
caoutchoucs utilisés pour les pneumatiques :
Les caoutchoucs utilisés pour fabriquer les pneus, sont constitués de
caoutchoucs bruts (naturels ou synthétiques), auxquels on ajoute pour améliorer
leur résistance à l'usure, du noir de carbone (carbon black : de 15 à 200
nanomètres) obtenu par combustion ou décomposition thermique d'hydrocarbures,
ainsi que des charges minérales (kaolins, craies, silices). On fait intervenir
aussi des agents vulcanisants, des accélérateurs de vulcanisation(aniline, thiocarbanilide), des
antioxygènes...
L'armature des pneus est constituée de textiles et de métaux ferreux.
Les pneus "verts" :
La notion de pneu "vert" correspond à un souci de limiter l'impact
des pneus sur l'environnement sans modifier leur résistance.
Michelin procède à des essais de remplacement partiel du noir de carbone par
des silices amorphes précipitées renforçantes.
Goodyear a un projet dont l'un des principaux axes de développement est la mise
au point d'un nouveau matériau de charge de renforcement ‘bio', comme
alternative à la charge de renforcement traditionnellement utilisée. Cette
nouvelle charge de renforcement est fabriquée à partir de ressources
renouvelables comme l'amidon de maïs.
5) Biosynthèses
des 1,4-polyisoprènes :
La biosynthèse du caoutchouc naturel
(dérivé cis) et du gutta-percha (dérivé trans) avec comme point de départ
l’acide éthanoïque et le coenzyme A (CoASH)
est la même que celle des terpènes :
Puis un composé à chaîne ramifiée se
forme ; en effet l’acétoacétylcoenzyme A donne une addition aldolique avec
la fonction cétone de l’acétylcoenzyme A, pour donner un dérivé de l’acide glutarique :
Par réduction on passe ensuite à l’acide mévalonique :
La formation de l’unité isoprène se fait d’abord par phosphorylation des
2 groupes alcool de l’acide mévalonique (grâce à l’ATP) puis il y a élimination
d’eau avec formation d’une double liaison C=C, puis décarboxylation (-CO2),
l’ensemble conduisant au 3-méthylbut-3-ènylpyrophosphate :
Il y a ensuite isomérisation du
composé obtenu grâce à un enzyme ayant un groupement S-H (E-SH)
Puis il y a formation d’un carbocation :
Ce carbocation agit sur une autre
molécule de 3-méthylbut-3-ènylpyrophosphate et l’on obtient du
géranylpyrophosphate après élimination d’un ion H+ :
Le composé obtenu est trans, mais
lors de l’élimination de H+ la double liaison créée peut être de
configuration cis, il s’agit alors du nérylpyrophosphate :
On peut écrire ces deux molécules un
peu différemment :
Une autre réaction de ce type peut
avoir lieu entre le géranylpyrophosphate et le
3-méthylbut-3-ènylpyrophosphate pour conduire au
farnésylpyrophosphate :
Si l’on continue à ajouter des
unités à cinq carbones au farnésylpyrophosphate selon le même processus on
aboutit au gutta-percha :
Si l’on part du nérylpyrophosphate
on aboutit au (Z)-1-4-polyisoprène c'est-à-dire au caoutchouc naturel
(NR) :