LES THES

Gérard Gomez


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Plan de l'étude

1) Les origines – Les principales zones de production – Un peu de botanique

                1-1) Les débuts

                1-2) Les pays producteurs et exportateurs

                1-3) Un peu de botanique

2) Les traitements du thé

                2-1) Thés verts

                2-2) Thés noirs

                2-3) Thés semi-fermentés (Oolong)

                2-4) La boisson

3) Les composés chimiques du thé

                3-1) Des polyphénols

                               3-1-1) Les flavonoïdes

                               3-1-2) Les acides-phénols

                               3-1-3) Des tanins

                3-2) Les alcaloïdes

                3-3) Les acides aminés et les enzymes

                               3-3-1) La théanine

                               3-3-2) Les autres acides aminés

                               3-3-3) Les enzymes

                3-4) Les glucides

                3-5) Les minéraux

                3-6) Des caroténoïdes

                3-7) Des vitamines

                3-8) Des composés terpéniques

 

Annexe 1  Les flavonoïdes

Annexe 2  Le noyau purine et la xanthine

 

THES


1) Les origines Les principales zones de productionUn peu de botanique

            1-1) Les débuts

Originaire d'Asie, vraisemblablement de Chine, il y a environ 5000 ans, le thé est une des premières boissons que l'homme a préparées à partir d'une plante qu'il a cultivée.

Son usage se répand, mais beaucoup plus tard, au Japon (VIIIème- IXème siècles), puis en Europe (XVIème-XVIIème siècles : Hollande, Angleterre, France), aux Amériques (XVIIème, XVIIIème siècles), en Inde (XIXème-XXème siècles).

D'abord réservée à l'aristocratie et à la bonne société, la boisson se démocratise rapidement.

            1-2) Les pays producteurs et exportateurs

Les 4 principaux pays producteurs et exportateurs de thé sont :

                        - La Chine qui représente environ 1/3 de la production mondiale ; tout type de thé mais surtout

·         Thés noirs exemple le Yunnan de la province du même nom

·         Thés verts

                        - L'Inde qui produit des thés réputés, essentiellement des thés noirs

·         Darjeeling originaire de la région du même nom dans le Bengale occidental

·         Assam originaire de la région du même nom sur les flancs de l'Himalaya

·         Nilgiri, originaire du sud du pays

- Le Kenya ; cette culture a été introduite au début du XXème siècle par les Britanniques

·         Surtout des thés noirs

·         Mais aussi un peu de thés vert, jaune, ou blanc.

- Le Sri Lanka (ex Ceylan) ; c'est suite à l'infection des plantations de café par un parasite destructeur (un champignon phytopathogène : Hemileia vastatrix) que le café a disparu de l'île et a été remplacé par le thé (1867).

·         Surtout des thés noirs cultivés dans le sud du pays

·         Mais aussi un large panel de variétés différentes.

Puis viennent d'autres pays comme la Turquie (thés noirs), l'Indonésie (thés noirs et verts), le Vietnam (thés verts) et le Japon qui produit essentiellement des thés verts (de type Sencha) pour sa consommation intérieure.

            1-3) Un peu de botanique

 

La classification botanique :

D'après l'APG II (Angiosperm Phylogeny Group) et depuis 2003, on peut classer les théiers de la façon suivante

 

            Embranchement :         Spermatophytes

            Sous-embranchement : Angiospermes

            Classe :                       Dicotylédones

            Ordre :                         Ericales

            Famille :                       Theaceae

            Genre :                         Camellia

            Espèce :                      Camellia sinensis (L.) O. Kuntze ; syn. Thea sinensis L.

 

On distingue deux variétés principales de Camellia sinensis :

            - Camellia sinensis var. sinensis ou théier de Chine, cultivé surtout en Chine et au Japon pour la production de thé vert, la feuille est petite et de couleur vert sombre.

            - Camellia sinensis var. assamica ou théier d'Assam, cultivé essentiellement en Inde et au Sri Lanka mais aussi en Indonésie et en Afrique pour la production de thé noir, à la feuille large, claire et charnue.

 

Le théier (Camellia sinensis), à l'état naturel est un arbre qui a un petit tronc mais de nombreux rameaux de 5 à 10m de haut pouvant atteindre 15m.

Ses fleurs dont la taille peut aller jusqu'à 3cm, sont odorantes ; elles possèdent cinq pétales, leur agencement étant symétrique par rapport à l'axe de la fleur et sont bisexuées.

Les feuilles sont persistantes, duveteuses quand elles sont jeunes et glabres ensuite. Elles ont environ 5 à 14cm de longueur et 2 à 5cm de largeur.

 

Les théiers cultivés (domestiques) le plus souvent obtenus par hybridation, sont maintenus à environ 1,20m par des coupes régulières (environ tous les deux à trois ans) et deviennent des arbres-nains permettant une récolte manuelle ; ces coupes favorisent aussi la croissance des bourgeons.

Un champ de thé correspond à une immensité verte, une vraie forêt miniature. La plante vit une cinquantaine d'années.

Les théiers poussent dans des régions au climat à la fois chaud (moyenne optimale annuelle 18 à 20°C, pas au-delà de 30°C ni en deça de -5°C, et peu de variation entre le jour et la nuit), ensoleillé (5h par jour en moyenne) et humide (pluies, 200cm par an environ, réparties sur toute l'année). Certaines périodes de sécheresse ne nuisent pas à la récolte, elles favorisent même la qualité des thés obtenus. Dans les régions tropicales on peut cultiver des théiers entre le niveau de la mer et 2500 m d'altitude ; l'altitude diminue le rendement mais augmente souvent la qualité. On peut les cultiver en forte déclivité.

A basse altitude la récolte du thé se fait jusqu'à 25 à 30 fois par an ; en altitude environ 15 fois car il pousse moins vite.

 

A l'extrémité supérieure de chaque branche d'un théier se forme un bourgeon qui en se développant va s'allonger et prendre une forme cylindrique, puis se dérouler pour devenir une feuille. Au stade de sa forme cylindrique ("pekoe" duvet en chinois car sa face inférieure est duveteuse), il doit être cueilli ainsi que les quelques feuilles suivantes (au maximum 5) en descendant le long des tiges. La meilleure qualité des thés est obtenue avec seulement les bourgeons terminaux (autrefois pratiquée pour les hauts personnages de la Chine impériale, cette cueillette a aujourd'hui disparu) ; la qualité diminue avec le nombre de feuilles cueillies en plus (en général le pekoe et deux feuilles)..

 

2) Les traitements du thé

Les thés noirs ou les thés verts proviennent de la même plante. Seuls les traitements qu'ils subissent après la cueillette les différencient.

            2-1) Thés verts

Aussitôt après la cueillette les feuilles de thé sont chauffées suivant différentes techniques pour inactiver certains enzymes (polyphénol oxydase en particulier).

                        - En Chine les feuilles sont chauffées à sec (torréfiées) dans des récipients en fonte pendant quelques minutes ; les feuilles subissent un pétrissage en boules ou en cônes, puis une courte exposition au soleil, puis divers autres pétrissages puis une nouvelle torréfaction, un étalement pour un refroidissement rapide ; les enzymes ont pratiquement été neutralisés, mais  une légère fermentation a pu se produire et bien que très réduite elle donne au thé un certain arôme.

                        - Au Japon elles sont chauffées à la vapeur d'eau et maintenues à 90 – 95°C pendant 30 à 40 minutes puis roulées et déroulées et enfin torréfiées ; La destruction des enzymes est plus complète et le thé est moins parfumé.

Toutes ces opérations sont aujourd'hui mécanisées mais il reste en Chine encore quelques traitements manuels.

            2-2) Thés noirs

Les opérations sont successivement, sur un thé fraîchement cueilli :

                        - Le flétrissage

On fait passer la teneur en eau des feuilles d'environ 75% à environ 55% pour les rendre moins rigides ; pour cela on fait circuler de l'air chaud (souffleries ou ventilateurs) pendant une quinzaine d'heures.

                        - Le roulage

Une opération qui dure environ une demi-heure au cours de laquelle les feuilles subissent dans un bac un mouvement de rotation et une pression par l'intermédiaire d'un couvercle. Au cours de cette opération le suc cellulaire est expulsé, les enzymes libérées, une partie du tanin est oxydée et une partie de la caféine libérée.

                        - L'oxydation ou "fermentation"

Elle a lieu à une température précise de 25 à 27°C, une humidité de 95 à 98%, une ventilation et une hygiène bien surveillées, pendant 2 à 3 heures.

Sous l'effet des enzymes (polyphénol oxydase ou peroxydase), les polyphénols sont transformés en théaflavines, théasinensines et théarubigines, qui donneront à la boisson issue de ces feuilles par infusion l'astringence et la couleur.

Remarque : Le terme de "fermentation" bien que très utilisé, n'est pas parfaitement approprié car il n'intervient pas d'enzyme d'origine microbienne dans l'oxydation des polyphénols du thé.

                        - La dessication

C'est l'étape la plus délicate ; il faut arrêter la fermentation assez rapidement pour éviter la formation de produits non désirés. Pour cela les feuilles sont mises sur un tapis roulant et soumises à un courant d'air chaud et très sec (environ 90°C). Il faut inactiver les enzymes sans rendre les feuilles cassantes et sans enlever l'arôme.

                        - Le tamisage et l'emballage

On trie les feuilles sur tamis vibrants.

Elles sont ensuite soit conditionnées dans des sachets ou mises en vrac dans des emballages, en bois le plus souvent, doublés d'aluminium afin d'éviter au maximum le contact avec l'humidité pendant le transport ou l'entreposage.

            2-3) Thés semi-fermentés

Ce sont les thés dits Oolong ou bleu oolong ou wu long à mi-chemin entre thés verts et thés noirs ; ils doivent leur nom à leur couleur bleue.

Ils subissent des opérations complètement manuelles :

Court flétrissage (au soleil pendant une heure environ), un roulage manuel jusqu'à ce que leur couleur vire au rouge et qu'ils dégagent un léger parfum, une courte "fermentation" puis plusieurs autres roulages et chauffages successifs et un séchage final dans des paniers.

Ces thés sont généralement faiblement dosés en caféine.

            2-4) La boisson

Elle se prépare par infusion des feuilles de thé dans de l'eau.

L'eau doit être douce, neutre, mais pas trop fade ; éviter l'eau adoucie.

L'eau doit être entre 90 et 95°C pour les thés noirs et le temps d'environ 4 minutes tandis que pour le thé vert et la plupart des autres la température doit être entre 75 et 85°C et le temps de 1 à 4 minutes.

Remarque :

Des études scientifiques ont montré que ces temps permettent d'extraire un maximum de caféine qui est assez soluble dans l'eau et une quantité optimale de tanins moins solubles (un excès de tanins donne à la boisson une âcreté désagréable).

 

3) Les composés chimiques du thé

Le lieu de culture et les traitements subis conditionnent, bien sûr, quantitativement et qualitativement les substances que l'on trouve dans les feuilles de thé et qu'on retrouve en grande partie dans la boisson.

On peut cependant donner un ordre de grandeur des principaux composés communs à l'ensemble des thés.

Par ordre décroissant, en pourcentage de la matière sèche :

Polyphénols

20 à 35%

Glucides

25%

Acides aminés, enzymes

12 à 15%

Matières minérales

4 à 7%

Alcaloïdes

2 à 4%

Caroténoïdes

0,5%

Composés terpéniques

0,1%

  Des acides organiques, des vitamines, des cires.

            3-1) Des polyphénols

Ils sont très nombreux (plusieurs milliers) ; ce sont des métabolites produits par la plante ; certains sont des composés de défense contre des parasites, d'autres au contraire attirent les insectes pollinisateurs.

Ce sont eux qui donnent à la boisson son astringence ; en effet ils font précipiter les glycoprotéines riches en proline de la salive, produisant une sensation âcre dans la bouche (la proline jouant le rôle de facteur lubrifiant de la salive).

Ils se forment par action de la lumière sur les acides aminés ; on comprend alors pourquoi on les retrouve en plus grand nombre dans le bourgeon et les feuilles terminales plus exposés aux rayons du soleil que les feuilles basses ; on comprend aussi que leur teneur varie en fonction de la saison.

Les plus nombreux, de loin sont les flavonoïdes (voir annexe 1) et notamment les flavanols et les flavonols ; on trouve aussi des acides phénols et des tanins.

                        3-1-1) Les flavonoïdes

Ils sont plus abondants dans le thé vert que dans le thé noir.

Ils représentent environ 1/4 de la matière sèche du thé vert ; ils sont hydrosolubles et passent facilement dans la boisson lors de l'infusion.

Ce sont, par ordre décroissant d'abondance dans le thé vert (1, 2, 3, 4) :

 

EGCG.gif

MOINSEPIGALLOCATECHINE.gif

-1-   Le (-)-gallate d'épigallocatéchine (EGCG)

-2-   Le (-)-épigallocatéchine (EGC)

ECG.gif

MOINSEPICATECHINE.gif

-3-   Le (-)-gallate d'épicatéchine (ECG)

-4-    L'épicatéchine (EC)

 

Ce sont des composés facilement oxydables ; ils sont de puissants antioxydants et contribuent à la réduction des dérivés lipidiques dans l'organisme.

Par oxydation, par exemple dans les thés noirs lors des "fermentations" ils sont transformés en polyphénols plus complexes :

            - Les théaflavines 

Ce sont des benzotropolones ; leur abondance dans les feuilles de thé noir est d'environ 2% de la matière sèche.

 

THEAFLAVINE2.gif

GALLATETHEAFLAVINE1.gif

La théaflavine

La 3-gallate de théaflavine

GALLATETHEAFLAVINE2.gif

GALLATETHEAFLAVINE3.gif

La 3'-gallate de théaflavine

La 3,3'-gallate de théaflavine

 

La formation des théaflavines débute par une oxydation d'un cycle des flavan-3-ols qui aboutit à une orthoquinone.

Par exemple avec l'EGC :

FORMTHEAFLAVINE2.gif

puis l'orthoquinone formée réagit sur l'EGC

 

FORMTHEAFLAVINE4.gif

 

Les théaflavines sont des substances de couleur rouge orangé.

 

            - Les théasinensines

Ce sont des molécules incolores, très minoritaires dans l'oxydation des flavan-3-ols. Leur abondance est de l'ordre de 0,05% de la matière sèche des feuilles de thé noir.

 

 

 

THEASINENSINEA.gif

THEASINENSINEB.gif

Théasinensine A

Théasinensine B

 

Leur formation a lieu de la même façon que les théaflavines à partir du dérivé orthoquinonique d'un flavan-3-ol qui réagit sur ce flavan-3-ol.

Ainsi avec l'EGC :

 

FORMTHEASINENSINE.gif

 

            - Les théarubigines

Il semble qu'au bout d'un certain temps les théaflavines et les théasinensines formées subissent une nouvelle oxydation pour donner des théarubigines qui sont des polymères dont la structure est assez mal connue.

Certains auteurs leur attribuent cette représentation :

THEARUBIGINES.gif

Ce sont des composés de couleur orange tirant sur le marron.

Ce sont les composés les plus abondants puisqu'ils représentent environ 20% de la matière sèche des feuilles de thé noir.

 

Trois flavonols principaux ainsi que leurs glycosides ont été isolés, en quantité sensiblement égale d'ailleurs dans les feuilles de thé vert et dans celles de thé noir.

Ce sont :

Flavonols

Un glycoside

QUERCETINE3.gif

RUTINE.gif

Quercétine

Rutine (glucose en -3- du flavanol et rhamnose fixé sur le glucose).

KAEMPFEROL2.gif

 

Kaempférol

 

MYRICETINE2.gif

 

Myricétine

 

 

Les flavonols sont de bons anti-oxydants.

La solubilité des glycosides est supérieure à celle des flavonols correspondants.

 

                        3-1-2) Les acides-phénols

On trouve en moyenne 4 à 5% d'acides phénols dans les feuille de thé :

            - Des esters quiniques de l'acide caféique

L'acide caféique se forme naturellement dans les végétaux par hydroxylation de l'acide 4-hydroxy (trans) cinnamique

CAFEIQUE.gif

Par réaction avec l'acide quinique

QUINIQUE

on obtient

CAFEIQUE5.gif

 

 

 

 

 

et

CAFEIQUE4.gif

 

            - L'acide gallique

ACIDEGALLIQUE.gif

Cet acide peut être obtenu par dégradation des tanins par des microorganismes.

 

            3-1-3) Des tanins

Les tanins sont des combinaisons complexes de glucose et d'acides polyphénoliques (dont l'acide gallique), généralement hydrosolubles :

Exemple 1

1,4,6-tri-O-galloyl-β-D-glucose

Formé par la condensation de 3 molécules d'acide gallique avec du β-D-glucose :

 

TANIN2.gif

 

Exemple 2

 

1,2,3,4,6-penta-O-digalloyl-β-D-glucose

Formé par la condensation de 5 molécules d'un dimère de l'acide gallique (l'acide digallique) avec du β-D-glucose :

Tannin.gif

 

                3-2) Les alcaloïdes

            - La caféine ou 1,3,7-triméthylxanthine ou 1,3,7-triméthylpurine-2,6-dione (Voir annexe 2)

CAFEINE10.gif

C'est un alcaloïde de la famille des xanthines, excitant du système nerveux central et stimulant du système cardio-vasculaire, présent dans le thé et le café.
La caféine a été découverte en 1819 par le chimiste allemand Friedlieb Runge, décrite en 1820 par Pelletier et isolée des graines de café en 1821 pour la première fois, par Robiquet.
Synthèse par Emil Fischer en 1897.

Elle représente entre 2 et 4% de la matière sèche des feuilles de thé.

            - La théobromine ou 3,7-diméthylxanthine ou 3,7-diméthyl-1-H-purine-2,6-dione.

THEOBROMINE10.gif

Ses effets excitant et stimulant sont moins marqués que ceux de la caféine et de la théophylline.

Elle est présente dans le cacao et donc dans le chocolat. La molécule est très voisine de celle de la caféine. On utilise la théobromine dans les cas d'insuffisance respiratoire chronique.

Elle représente environ 0,15% de la matière sèche des feuilles de thé.

            - La théophylline ou 1,3-diméthylxanthine ou 1,3-diméthyl-7H-purine-2,6-dione.

THEOPHYLLINE10.gif

C'est un inhibiteur des phosphodiestérases.

Cette molécule a des propriétés diurétiques et bronchodilatatrices. Elle a été utilisée comme antiasthmatique de fond.

Effet excitant et psychostimulant.

Elle représente environ 0,03% de la matière sèche des feuilles de thé.

            3-3) Les acides aminés et les enzymes

                        3-3-1) La théanine

On a pu isoler 19 acides aminés des feuilles et des bourgeons des théiers..

Parmi ceux-ci la théanine est la plus importante tant en ce qui concerne la quantité (1 à 2% du poids des feuilles sèches) que la qualité car elle est responsable avec les polyphénols non oxydés de l'arôme du thé vert et est donc directement liée au prix de vente de celui-ci.

 

THEANINE.gif

C'est un acide aminé non protéinogène présent sous forme libre dans le thé vert.

C'est la molécule responsable du goût umami des thés verts japonais ; elle existe aussi dans les thés noirs.

Remarque :

Les 5 saveurs de base sont : salé, sucré, amer, acide et umami.

Ce dernier goût est par exemple celui du miso japonais.

Elle est biosynthétisée à partir de l'acide glutamique et de l'éthylamine, grâce à un enzyme, le L-glutamate éthylamine ligase (ou théanine synthétase) et grâce à l'ATP, au niveau des racines du théier :

 

THEANINESYNTH.gif

Remarque :

La théanine n'est pas seulement présente dans les thés ; on en  trouve également dans un champignon le Bolet bai (Xerocomus badius).

On reconnaît à la théanine un effet relaxant sur l'organisme.

                        3-3-2) Les autres acides aminés

 

GABA.gif

ASPARTIQUE.gif

SERINE.gif

ASPARAGINE.gif

ARGININE.gif

GLUTAMIQUE.gif

Acide γ-aminobutyrique

Acide aspartique

Sérine

Asparagine

Arginine

Acide glutamique

LYSINE.gif

HISTIDINE.gif

LEUCINE.gif

VALINE.gif

GLUTAMINE.gif

GLYCINE.gif

Lysine

Histidine

Leucine

Valine

Glutamine

Glycine

THREONINE.gif

ALANINE

TRYPTOPHANE

ISOLEUCINE

PHENYLALANINE

PROLINE

Thréonine

Alanine

Tryptophane

Isoleucine

Phénylalanine

Proline

 

La théanine, l'acide glutamique, l'acide aspartique et l'arginine sont les principaux acides aminés présents dans les feuilles au printemps.

                        3-3-3) Les enzymes

La polyphénol oxydase et la peroxydase sont les deux principales enzymes de la feuille de thé.

En chauffant légèrement les feuilles de thé après cueillette  on inactive ces enzymes et cela permet aux feuilles de rester vertes ; sans cela, en effet, les polyphénols entrent en contact avec l'oxygène de l'air, lors de la destruction des parois des cellules au cours de la cueillette, ainsi qu'avec les enzymes et il se produit un brunissement des feuilles.

            3-4) Les glucides

Ce sont surtout des polysaccharides ; ils représentent environ 25% de la masse des feuilles sèches :

                        - Les celluloses

Les feuilles de thé en contiennent en moyenne 6,5%.

La cellulose est une macromolécule linéaire et non–ramifiée, formée d'environ 500 à 5000 unités monomères de glucose reliées les unes aux autres par des liaisons β-1,4-glycosidiques ; le motif est un motif de cellobiose :


CELLULOSE2.gif

Les différentes chaînes placées côte à côte sont liées par de nombreuses liaisons hydrogène ce qui donne à ce matériau une très grande rigidité et qui explique qu'elle est la substance de soutien (parois) des cellules jeunes des végétaux.

Le glucose présent dans la cellulose ne peut cependant être utilisé en tant que tel, ni par les plantes ni par les animaux. Dans l’alimentation humaine, la cellulose est présente sous forme de fibres. Seuls les ruminants peuvent profiter de la cellulose, car durant leur digestion des microorganismes parviennent à diviser les macromolécules, qui deviennent alors assimilables par l’organisme. D’un point de vue chimique on peut, dans des conditions très particulières, parvenir à transformer du bois en sucres fermentescibles, comme le fait par exemple la Suède, afin de produire du bioéthanol utilisé ensuite comme carburant.

Elle est insoluble dans l'eau et la plupart des solvants organiques et n'est solubilisée que par une solution ammoniacale d'hydroxyde de cuivre(II) : la liqueur de Schweitzer. Son hydrolyse acide conduit au glucose.

 

                        - Les hémicelluloses ou pentosanes

Les feuilles de thé en contiennent en moyenne 11,5%

Les hémicelluloses sont des polymères plus courts (masse molaire inférieure) ou ramifiés formés à partir de pentoses (oses à cinq atomes de carbone comme le xylose), ou d'hexoses autres que le glucose (galactose par exemple). Quelle que soit l'espèce d’arbre on retrouve la même structure pour la cellulose alors que les hémicelluloses ont des compositions et des structures qui varient considérablement selon qu'elles proviennent de feuillus ou de résineux. Les hémicelluloses de feuillus sont généralement plus riches en pentoses, que celles des résineux qui habituellement contiennent davantage d'hexoses.

 

                        - Les substances pectiques

C'est un ensemble complexe formé d'une ossature majoritaire résultant d'un enchaînement d'acides α-D-galacturonique liés en 1-4 (unités homogalacturonanes)

PECTINE1.jpg

Certaines des unités homogalacturonanes peuvent être méthylées et/ou acétylées :

 

PECTINES4.gif

Certaines unités homogalacturonanes peuvent être substituées par des oses :

L'ose est alors le L(-)-rhamnose :

RHAMNOSE1.gif

RHAMNOSE2.gif

L'ose est alors le D(+)-xylose :

XYLOSE2.gif

XYLOSE1.gif

L'ose est alors le D-apiose

APIOSE.gif

APIOSE3.gif

On peut donner un aperçu général de la structure d'une pectine par le schéma suivant :

PECTINE3.jpg

Roger PRAT, Michèle MOSINIAK, Jean-Claude ROLAND : La paroi primaire de la cellule végétale ; les pectines.

Les pectines sont utilisées dans les industries cosmétique, pharmaceutique ainsi que dans l'industrie alimentaire où elles servent (E 440) comme agent de texture, gélifiants, stabilisants et épaississants (confitures par exemple).

Les facteurs influant sur le mécanisme d'association des pectines et donc sur la formation des gels sont, le degré de méthylation (% de méthylation de la chaîne principale) le pH, la concentration en sucres et en acides, la présence de chaînes latérales et le degré de polymérisation (longueur des chaînes principales).

            3-5) Les minéraux

Ils représentent 4 à 7% du poids de la feuille sèche.

On trouve

- Potassium K (environ 20 mg/g soit 9000 à 34000 ppm)

- Aluminium Al (environ 20 à 11000 ppm) ; il est en majorité complexé par les polyphénols.

- Fluor (sous forme de fluorures F-) de 3 à 200 ppm.

On trouve aussi en quantités moindres Calcium (Ca), Magnésium (Mg), Manganèse (Mn), Fer (Fe), Zinc (Zn), Cuivre (Cu), Nickel (Ni).

            3-6) Des caroténoïdes

En très faible quantité ils participent néanmoins à l'arôme des thés noirs notamment :

 

Lycopène (C40H56)

LYCOPENE

 

γ-carotène(C40H56)

 

GCAROTENE

Phytoène

(C40H64)

PHYTOENE.gif

Cryptoxanthine

(C40H56O)

CRYPTOXANTHINE.gif

Violaxanthine

(C40H56O4)

VIOLAXANTHINE

Lutéine

(C40H56O2)

LUTEINE.gif

Zéaxanthine

(C40H56O2)

ZEAXANTHINE.gif

            3-7) Des vitamines

On trouve les vitamines C et diverses vitamines B présentes en petites quantités :

Vitamine C

On en trouve jusqu'à 500mg/kg dans les feuilles fraîches. Plus abondante dans le thé vert que dans le noir car elle est détruite lors de la "fermentation".C'est une vitamine hydrosoluble qui Intervient dans de nombreux métabolismes.

Elle renforce les défenses naturelles de l'organisme.

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Vitamine B3 ou acide nicotinique

C'est une vitamine hydrosoluble.

C'est un cofacteur* d'oxydo-réduction (coenzyme) dans le métabolisme des glucides des protéines et des lipides, réactions qui permettent à l'organisme de s'approvisionner en énergie auprès de molécules "combustibles" comme le glucose et les acides gras.

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Vitamine B2 ou riboflavine

Les flavines sont des coenzymes qui transportent deux protons et deux électrons. C’est par un mécanisme faisant intervenir hydrogène ou électron qu’elles interviennent dans les oxydations cellulaires en se réduisant et se réoxydant réversiblement.

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Vitamine B5 ou Acide pantothénique

Cette vitamine est omniprésente dans l'alimentation et ses carences sont exceptionnelles (on peut observer une carence chez certains alcooliques ou certaines femmes enceintes).

Une carence en vitamine B5 entraîne asthénie, insomnie, crampes dans les jambes, fatigue et état dépressif, infections respiratoires…

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Vitamine B8

ou Vitamine H

ou Coenzyme R

ou Biotine

C'est une vitamine hydrosoluble.

Les carences sont rares car la vitamine B8 est présente dans beaucoup d'aliments. Elle se manifeste selon le degré par des ongles cassants, une alopécie modérée, une peau sèche et écaillée ; fatigue, perte d'appétit, somnolence, diminution du tonus musculaire…

La biotine a une grande affinité pour une glycoprotéine, l'avidine (présente dans le blanc d'oeuf cru), sur laquelle elle se fixe en formant un complexe résistant à toutes les dégradations enzymatiques dans le tube digestif. Une trop grande quantité d'avidine peut donc entraîner une carence en biotine celle ci étant soustraite à l'absorption intestinale.

 

VITB8.gif

            3-8) Des composés terpéniques

Ils représentent environ 1% de la masse des feuilles sèches de thé, c'est-à-dire qu'ils existent en quantités infimes.

Ils participent néanmoins au goût et à l'arôme des boissons.

Pour la plupart ces substances dérivent d'autres substances apparues au cours des traitements des thés.

Ce sont surtout des alcools des phénols et des aldéhydes monoterpéniques :

LINALOL

GERANIOL

EUGENOL

Linalol

Géraniol

Eugénol

JASMONAL A

MENTHOL

THYMOL

Jasmonal

Lévo-menthol

Thymol


Annexe 1

Les flavonoïdes

On dit d'un très grand nombre de substances naturelles qu'elles sont des flavonoïdes ; ce sont toutes des composés appartenant à la famille des polyphénols ; elles constituent les pigments de la plupart des végétaux et interviennent dans la coloration des feuilles, des fleurs, des fruits.
A l'état naturel on trouve très souvent les flavonoïdes sous forme d'hétérosides, une ou plusieurs de leurs fonctions phénols sont alors glycosylées (les oses étant le glucose, le galactose, le rhamnose ou l'arabinose). La partie autre que l'ose est appelée aglycone.
Le nom de flavonoïdes vient du fait que ces molécules ont toutes une structure semblable à celle de la molécule de flavone (ou 2-phényl
chromone) :
FLAVONE
Les flavonoïdes sont divisés en plusieurs classes qui se différencient par le degré de saturation de l'hétérocycle de l'aglycone, son oxydation et sa conformation spatiale :
- les flavonols
- les anthocyanidines (ou anthocyanidols)
- les flavanols
Les anthocyanidines peuvent être obtenues soit à partir des flavonols (par réduction) ou par oxydation des flavanols :
FLAVONOIDES1
Les flavonoïdes sont solubles dans l'eau chaude.

                1) Les flavonols
Ce sont des pigments jaunes présents notamment dans la pellicule des raisins et dans les feuilles de vigne.
Leur forme aglycone est très stable et dans l'hétéroside, l'ose est fixé sur l'oxygène du OH placé en position 3 :

FLAVONOLS

                2) Les anthocyanidines (ou anthocyanidols):
Ils constituent la partie aglycone des
anthocyanes.
Les anthocyanidines ont pour structure de base l'ion flavylium :
FLAVYLIUM.gif
Ils ont une structure commune polyhydroxylée :
ANTHOC
                3) Les flavan-3-ols:
Ils ont également une structure commune polyhydroxylée :
FLAVAN3OL

On remarque deux centres chiraux dans cette structure, en C2 et C3.

La catéchine correspond à 2 liaisons trans en C2 et C3 et l'épicatéchine à 2 liaisons cis.

Il y a donc 4 stéréoisomères :

- La (+)-catéchine et la (-)-catéchine

- La (+)-épicatéchine et la (-)-épicatéchine


Annexe 2

Le noyau purine et la xanthine

                - Noyau purine

PURINE.gif

La numérotation de ce noyau ne correspond pas à la numération systématique.

On distingue plusieurs isomères (tautomères) :

PURINE5H.gif

PURINE7H.gif

PURINE9H.gif

5-H-purine

7-H-purine

9-H-purine

Le noyau purine ainsi représenté n'existe pas dans la nature ; on trouve par contre de nombreux dérivés dont la xanthine qui correspond à un dérivé hydroxylé.

 

                - Xanthine

 

XANTHINEOH.gif

XANTHINEOXO.gif

Xanthine

Xanthine (forme oxo)