DES TEXTILES TECHNIQUES.
Gérard GOMEZ
Avec la
collaboration de Jacques BARON
Plan de
l'étude :
1) Définition |
|
2) Fibres à hautes performances 2-1) Le
Kevlar ® 2-2) Le
Vectran
® 2-3) Le
PBO 2-4) La
fibre M5 |
8) Le Goretex ® 9) Les tissus résistant
aux flammes |
|
|
|
|
|
1) Définition :
Un
textile est un matériau dont on peut faire des fils susceptibles d'être tissés.
De ce fait
ce matériau doit se présenter sous forme de fibres naturelles (exemple :
cellulose) ou de fibres obtenues par passage d'une matière à la filière
(exemple : polyamide).
D'un
point de vue strict, on appelle fibre toute particule allongée dont la longueur
est au moins trois fois supérieure au diamètre ; exemple : fibres
d'amiante.
Ainsi,
les fibres de coton (filaments surmontant les graines du cotonnier) sont
associées pour faire du fil de coton dont le tissage donne un tissu de coton.
A
l'usage la distinction entre fibre, fil et filament n'est pas toujours
respectée : fil d'un cocon de soie, fibre optique, filament d'ampoule
électrique,…..
On
qualifie de techniques les textiles qui ont été conçus pour répondre à un
cahier des charges définissant des propriétés plus spécifiques que celles que
possèdent les tissus utilisés habituellement pour les vêtements et
l'ameublement.
Un
exemple
: les aramides, dont fait partie le Kevlar, ont des résistances mécaniques et
thermiques très élevées ; ils servent, entre autres, à faire des amarres de
bateaux ou des gilets pare-balles.
Ces
textiles sont nombreux et il serait difficile d'en faire une étude exhaustive,
tant sont fécondes les recherches qui leur sont consacrées.
2) Fibres à hautes
performances :
2-1) Le Kevlar
® ou PPD-T
(Poly(p-phénylènetéréphtalamide)
Il
fait partie d'une famille de polymères thermoplastiques couramment appelés
polyaramides ; ce sont des polyamides comportant des noyaux aromatiques.
Le kevlar est le plus connu de ces
polyaramides ; il a été obtenu en 1973 (DuPont de Nemours) en condensant
-
l'acide benzène-1,4-dicarboxylique (ou téréphtalique)
-
et le p.phénylènediamine
On obtient
Entre les chaînes de polymères existent de
nombreuses liaisons hydrogène
qui lui confèrent une structure cristalline
ce qui entraîne une grande rigidité, une résistance à la rupture
particulièrement élevée, un faible allongement sous la contrainte (de 2,5 à 4%)
et un fluage très faible (allongement irréversible à long terme de la fibre).
Les résistances mécanique, à la chaleur, à l'étirement et au cisaillement de ce
matériau sont supérieures à celles du nylon ; c'est aussi un très bon isolant
électrique.
Il est très utilisé pour le matériel sportif
(cadres de vélos, canoë-kayak, raquettes de tennis, patinage de vitesse,
cordages ….) dans les équipements automobiles (pneumatiques), dans le domaine
aéronautique (ailes d'avions) ; associé à d'autres fibres (verre ou carbone) on
le trouve dans le domaine de la sécurité (gilets pare-balles)…….
Les
aramides comme le Kevlar sont des poly(para-aramides).
On connaît aussi des poly(méta-aramides)
comme par exemple :
obtenu par condensation de l'acide adipique
avec le méta-xylènediamine
qui constituent des fibres textiles légères
et résistantes.
"Les fibres synthétiques sont obtenues à
partir des chaînes de polymères par une technique de filage qui consiste, après
extrusion à l'état fondu et refroidissement partiel de la résine, à étirer les
chaînes dans un sens privilégié, de sorte que les forces des interactions
moléculaires puissent être exploitées pour la résistance thermique et/ou
mécaniques" (extrait de l'article
de Guy Némoz, Le textile, un matériau multifonctionnel").
Remarquons quelques faiblesses cependant de
ces polyaramides :
- faible résistance aux U.V.
- faible résistance à l'humidité (elles
absorbent l'eau facilement et s'alourdissent).
Elles ont donc tendance à vieillir
prématurément.
2-2)
Le Vectran ®
Le motif de ce polymère est le suivant :
Ses propriétés sont comparables à celles du
Kevlar.
Il est utilisé notamment comme tissu pour du
matériel gonflable en aérospatiale.
2-3)
Le PBO
Connu sous l'appellation "Zylon",
c'est le poly(p.phénylène-2,6-benzo bis oxazole)
La plus résistante à la rupture des fibres
connues avant que soit mise au point la fibre M5.
Le PBO peut remplacer le Kevlar dans diverses
applications et notamment dans les gilets pare-balles ; en effet le gain de
poids pour une efficacité identique vis-à-vis d'un projectile est de 25% si
l'on utilise le PBO au lieu d'utiliser le Kevlar.
2-4)
La fibre M5
C'est la poly(hydroquinone-di imidazo
pyridine)
Ce
matériau, apparu en 1999, a la plus grande résistance à la traction et la plus
grande résistance au feu. On attribue ces performances aux liaisons hydrogène
qui se développent dans davantage de directions dans l'espace que pour beaucoup
d'autres polymères.
Le
gain de poids par rapport au Kevlar pour une efficacité identique pour une même
application est de 50%.
Le
retard de la mise sur le marché de ce matériau est dû aux difficultés
d'extrusion.
2-5)
Le polyéthylène à masse molaire très élevée : HMPE
Les chaînes sont très longues (plusieurs
millions de monomères) et non ramifiées.
Les forces intermoléculaires très nombreuses
le long de ces grandes chaînes, renforcent la cohésion de la matière.
La résistance à la traction est bien
supérieure à celle des autres polyéthylènes. On parle de polyéthylène à haut
module (il s'agit du module
d'Young).
C'est une matière parmi celles qui ont la
plus grande résistance aux chocs dans les thermoplastiques. Elle est très
intéressante pour faire des casques, des boucliers, des cuirasses d'escrime, ….
Il est particulièrement résistant à
l'abrasion (auto-lubrifiant) et sa résistance chimique est remarquable. Un
point faible, sa température de fusion est seulement de 136°C.
Le HMPE est commercialisé sous les noms
Dynéema ® et Spectra ®.
Une comparaison des
fibres à hautes performances :
Nous utiliserons le graphique ci-dessous
-
Soit une fibre de longueur l0 et de surface de section droite S. La
contrainte R est égale à la force appliquée par unité de surface :
La "déformation" concerne
l'allongement subi. Il peut être réversible tant que la contrainte appliquée ne
dépasse pas une certaine limite
dite limite d'élasticité ; plus précisément,
il s'agit (en pourcentage) de l'allongement l-l0 pour une longueur
initiale l0 de la fibre soit
-
Le graphique montre que pour les fibres très résistantes à la traction
l'allongement est très faible et on n'atteint pas la limite d'élasticité. La
pente de ces droites représente le module d'Young E car par définition
Plus la pente est importante, plus le module
d'Young est élevé et plus la fibre est résistante à la traction.
Un module d'Young élevé traduit un matériau
rigide.
Quelques valeurs
:
NB : il peut y avoir des variations dans les
données pour de multiples raisons (nombre de monomères, conditions d'obtention,
….)
|
Re (GPa) |
|
E (GPa) |
M5 |
9 |
2,5 |
1000 |
PBO |
5,2 |
3,1 |
170 |
HMPE |
4 |
- |
100 |
Aramides |
3 |
- |
60-140 |
Kevlar |
3 |
3,5 |
90 |
Vectran |
3 |
1,4 |
65 |
PE |
6-30 |
- |
0,2-0,7 |
Acier |
0,2-2 |
3-40 |
200 |
Ce sont des fibres dont le diamètre se situe
entre 5 et 8 µm et qui comme leur nom l'indique sont constituées de carbone.
Elles peuvent être utilisées seules ou sous
forme de matériaux composites (fibre de carbone-carbone)* et les utilisations
sont nombreuses : raquettes de tennis, cannes à pêche, bâtons de ski, clubs de
golf, vélos, pales d'éoliennes, renforcement du béton, pièces d'avions (freins,
empennages, volets), pièces de voitures (freins de voitures de formule 1) ; on
l'utilise en chirurgie (prothèse de hanche par exemple)....
*On appelle matériaux composites
des matériaux composés d'un renfort, fibres résistantes noyées dans une matrice
moins résistante mécaniquement : résines thermoplastiques ou thermodurcissables
(polyesters, polyuréthanes, silicones) ou alliages d'aluminium ou de titane, ou
encore de nature minérale : graphite, carbure de silicium ; dans le composite
fibre de carbone-carbone, la fibre de carbone constitue le renfort, la matrice
étant le graphite.
Elles
sont fabriquées à partir de polyacrylonitrile P.A.N. (appelé précurseur)
; le polyacrylonitrile est le polymère correspondant à l'acrylonitrile :
Une
première étape consiste à oxyder des fibres de PAN à l'air vers
200 ou 300°C pendant 1 à 2 heures. La deuxième étape est la carbonisation,
obtenue en chauffant le produit précédent entre 700 et 1500°C pendant 2 à 10
minutes sous atmosphère de diazote ; cette étape comme son nom l'indique
conduit à éliminer la plupart des atomes autres que ceux de carbone (donc H et
N : voir ci-dessous). On obtient une fibre contenant environ 90% de carbone, 8%
d'azote, 1% d'oxygène et 1% d'hydrogène, qui a une résistance élevée mais une
faible élasticité et qu'on peut utiliser après traitement de surface.
On peut
aussi après la carbonisation, procéder à la graphitisation en chauffant
la fibre précédente entre 2000 et 3000°C pendant une minute. On obtient un
produit à 99% de carbone possédant la structure en feuillets du graphite (voir
ci-dessous), une élasticité élevée mais une moindre résistance ; elle nécessite
un traitement (en principe une oxydation électrolytique de surface) qui
augmentera son adhérence sur une matrice en polymère.
Les
avantages des fibres de carbone sont :
- Faible densité.
- Grande souplesse.
- Un faible coefficient de dilatation thermique
- Une très bonne tenue à la compression (en comparaison de la fibre de verre ou
du Kevlar).
- Une très bonne tenue à haute température (2000°C) en atmosphère non oxydante.
- Une excellente rigidité (surtout les fibres graphitisées).
- Bonnes conductions électrique et thermique ; elles peuvent être encore
augmentées par métallisation des fibres (dépôt de nickel ou de cuivre).
- Complète inertie aux agents chimiques non oxydants.
Quelques inconvénients :
- Sensibilité au choc mécanique et à l'abrasion.
- Leur raideur rend difficile le bobinage des filaments.
Remarque :Bien que la plupart
des fibres de carbone soient obtenues à partir de P.A.N., il existe
d'autres précurseurs : la rayonne,
le brai (les fibres obtenues sont de bas de gamme) et plus récemment des lignines.
4) La fibre polylactide :
Une
fibre créée dans les années 1980 et qui a tout de suite intéressé le domaine
médical est le polylactide (PLA), un polyester entièrement biocompatible et biorésorbable
donc biodégradable. Les chirurgiens l'utilisent (sutures, implants) car il se décompose par
hydrolyse par l'eau sous l'effet d'enzymes.
L'acide
lactique
obtenu
par fermentation du D-glucose issu de l'amidon de maïs par exemple, conduit par
condensation au lactide
La
polymérisation du lactide a lieu par ouverture du cycle
(POC) .
Le
polymère
qui se
déforme dès 50°C est dégradable dans l'organisme par hydrolyse des fonctions
esters, le métabolite naturel étant l'acide lactique
les
termes ultimes de la dégradation étant CO2 et H2O.
On
l'utilise de nos jours pour confectionner de nouveaux tissus (en ameublement
par exemple) et en association avec de la soie, pour des vêtements.
Ce sont des fibres très fines (de titre
inférieur à 0,1 tex soit 0,1g de matière pour 1000m de fil) dont le diamètre
est de l'ordre de 2 à 3 µm soit environ 25 fois plus fines qu'un cheveu,
fabriquées à partir d'un matériau synthétique (polyester, polyamide, acrylique)
ou artificiel comme la viscose.
On les produit par extrusion de la matière
dans une filière, puis étirages successifs pour réduire le diamètre.
Afin "d'aérer" la matière constituant
la microfibre, c'est-à-dire d'emmagasiner le plus d'air possible en son sein,
ce qui contribuera à augmenter son indice d'isolation thermique, on produit un
alliage de deux matériaux (par exemple polyester et polyamide) ; on l'extrude
puis, avant de l'étirer, on trempe les fibres dans un solvant qui dissoudra
l'une des deux matières (par exemple le polyamide) et l'on obtiendra une fibre
polyester avec des canaux, que l'on étirera jusqu'à obtenir le bon diamètre.
Le schéma ci-dessous montre le principe de
cette opération.
D'après l'Aide-mémoire "Textiles
techniques" par Daniel Weidmann (Dunod)
On peut avec ces fils très fins obtenir des
ouvrages (tissus, tricots) très denses et dont la structure, isolante
thermiquement, permet d'empêcher le vent de passer tout en étant imperméable
(les molécules d'eau ne peuvent pénétrer) mais respirante (la vapeur d'eau, en
pratique la transpiration, peut être évacuée).
Le toucher est doux et soyeux. Des
inconvénients cependant : ils s'accrochent facilement, se froissent et sont
sensibles aux taches.
On les utilise dans les vêtements de sport
mais aussi dans le secteur de la lingerie, des collants, ….
6) Les géotextiles :
On
appelle géotextile, un tissu utilisé en agriculture ou dans les travaux de
bâtiment ou de génie civil.
En
agriculture, les géotextiles :
- peuvent constituer une barrière
contre les pénétrations de racines végétales ; par exemple, si on veut éviter
que des bambous traçants n'aillent envahir le jardin, on creuse un emplacement
dans lequel on voudra voir évoluer la partie souterraine de la plante et on le
tapisse de géotextile adapté qui contiendra les rhizomes.
- peuvent permettre de planter un
végétal en terre "hostile", c'est-à-dire dont la composition est
inadaptée à la plante (par exemple terre calcaire pour plante nécessitant du
terreau) ; il suffit de creuser un emplacement de taille suffisante, de le
recouvrir de géotextile et de remplir de terre et de terreau adaptés. Le
géotextile sépare les deux terres tout en laissant passer l'eau et les
substances nutritives qu'elle contient.
- peuvent empêcher l'érosion de la
terre sur des terrains en pente.
…….
En
travaux de bâtiment et en génie civil, les géotextiles :
- peuvent protéger des drains en
laissant passer l'eau mais en retenant les parties fines susceptibles de les
colmater.
- peuvent servir d'armature pour
l'asphalte
…….
Les
caractéristiques techniques dont dépendront les applications dépendent de la
nature du matériau qui le constitue et de la façon dont il a été fabriqué.
Il
existe des géotextiles en matière naturelle (toile de jute par exemple) qu'on
utilise lorsqu'on souhaite une protection temporaire ; à terme la toile
pourrira et finira par disparaître.
La
plupart du temps il s'agit de polymères synthétiques :
- en polypropylène (PP) très
utilisés car très stables chimiquement :
- en polyester (PET) : Il s'agit du
polytéréphtalate d'éthylène glycol
- en polyamides (PA) comme par
exemple le PA 6-6 ou nylon
- en polyéthylène (PE)
la fabrication du géotextile est
importante ; on distingue
-
des géotextiles tissés, ce sont alors des tissus synthétiques.
-
des géotextiles non tissés dont certains sont étanches car les fibres ont été
assemblées par soudage à chaud (on les appelle des géotextiles thermoliés) ;
d'autres sont aiguilletés c'est-à-dire que les fibres textiles ont été
entremêlées à l'aide d'aiguilles à crochets et sont moins onéreuses que les
précédentes.
On peut tisser des fils dits
"céramiques" constitués d'une matrice en céramique noyée dans un
polyuréthane.
-
La céramique est obtenue à partir de kaolin (ou argile blanche), un ensemble de
silicates d'aluminium, ou bien obtenue par fusion d'alumine Al2O3
et de silice SiO2.
-
Les polyuréthanes résultent de l’action d’un di-isocyanate sur un diol :
Les vêtements obtenus par tissage de
ces fils sont essentiellement des vêtements de sport.
Ils sont très résistants à l'usure
et, les céramiques étant des matériaux réfractaires très résistants à la
chaleur, ce sont des isolants thermiques.
8) Le
Goretex ®
-
Il ne s'agit pas à proprement parler d'un textile, mais d'une membrane,
fabriquée à partir du polymère PolyTétraFluoroEthylène (ou téflon) lui-même
obtenu par polymérisation du tétrafluoroéthylène :
Le polymère est chauffé puis étiré en
lame ; cette membrane obtenue est imperméable mais "respirante".
Imperméable c'est-à-dire qu'elle est
étanche aux liquides ; respirante c'est-à-dire qu'elle laisse filtrer l’air et
la vapeur d’eau plus particulièrement celle produite par les mouvements du corps
lorsque cette membrane est utilisée pour faire un vêtement.
-
La technologie de la membrane Gore-Tex®:
La membrane de téflon étiré comporte
une multitude de très petits pores.
Un milliard quatre cents millions de
pores au centimètre carré d’un diamètre de 0,2 micromètre. Selon les techniques
de mise en œuvre le nombre et la dimension des pores sont variables.
Les pores sont environ 20 000 fois
plus petits qu’une gouttelette d’eau ; mais bien plus grands qu’une molécule
d’eau à l’état gazeux.
Cette structure microporeuse permet
de laisser passer la vapeur d’eau produite par le corps d’où la «respirabilité»
mais d’arrêter l’eau à l’état liquide venant de l’extérieur d’où
l’imperméabilité. On joue sur la dimension des pores pour favoriser la « respirabilité
» ou l’imperméabilité.
On mesure l’imperméabilité d’un tissu
en Schmerber, cela correspond à la pression (1Schmerber =1 mm de colonne d’eau=
10 Pa=0,1mbar) à partir de laquelle le tissu se laisse traverser par l’eau.
L’ordre de grandeur de l’imperméabilité d’une membrane Gore-Tex® est 1500
Schmerber
On mesure la « respirabilité » d’un
tissu donc sa capacité à évacuer la vapeur d’eau par son indice RET.
(Resistance Evaporative Transfert)
Plus l’indice est faible plus le
vêtement est respirant, un vêtement d'indice inférieur à 12 est respirant,
au-delà de 20 il est non respirant. L'indice RET du Gore-Tex® varie entre 2,5
et 6 RET.
Ce sont deux chimistes américains
Bill et Bob Gore (Père et fils) qui ont déposé un brevet en 1969.
9) Tissus résistant aux flammes :
Il
existe des vêtements constitués de tissus permettant de se protéger des
flammes.
Ces
tissus peuvent être de deux ordres :
- Tissus intrinsèquement
ignifuges
C'est
le cas du Kevlar. Les fibres aramides sont ininflammables et créent une
barrière protectrice entre la chaleur et la peau en se dilatant et en se
densifiant mais en restant souples jusqu'au refroidissement pour ne pas
empêcher les mouvements.
C'est
la nature même du matériau qui confère au tissu la propriété ignifuge qui ne
disparaît donc pas par lavage même avec des produits chlorés.
Dans
cette catégorie on trouve aussi la fibre de verre qui bien sûr n'est pas de
nature organique.
- Tissus ignifugés
Ils
sont constitués de fibres naturelles, artificielles ou synthétiques,
inflammables qui ont été traitées chimiquement pour résister à la chaleur et
aux flammes.
Souvent
c'est une réaction chimique qui se déclenche sous l'effet de la chaleur et qui
modifie le matériau pour lui permettre de résister. La chaleur permet par
exemple la réticulation du polymère dont est constitué le matériau pour donner
un solide dur et résistant à la chaleur.
Un
départ de flamme implique un processus radicalaire de combustion qui met en jeu
des radicaux H◦ et HO◦ ; ces
derniers, par exemple, contribuent à l'oxydation de CO en CO2
opération très exothermique qui explique la chaleur générée par la flamme. Des
molécules telles que les polybromodiphényléthers ou PBDE
(Les Br
mentionnés de part et d'autre des parenthèses indiquant que les noyaux
benzéniques liés à l'oxygène, peuvent être substitués par des atomes de Brome
(de 1 à 5 atomes)), incorporées aux tissus, vont au contact d'une flamme donner
naissance à des radicaux Br◦ qui neutralisent les radicaux H◦ et HO◦ en réagissant avec eux.
D'autres
molécules halogénées peuvent jouer le même rôle, c'est le cas de l'anhydride
chlorendique
Plusieurs
techniques sont utilisées pour ignifuger un tissu (coton, viscose, polyester,
acrylique) ; nous en citerons deux :
- on trempe le tissu dans un bac
contenant le produit ignifuge puis on essore et on sèche. Les lavages que subissent
les vêtements ainsi ignifugés atténuent la protection qui finit par
disparaître.
- on enduit le tissu d'un monomère
et on soumet l'ensemble à des conditions qui permettront la polymérisation, ce
qui confère au tissu protégé par ce polymère, des propriétés anti-feu.
10) Les textiles à
microcapsules :
On peut coller sur une fibre classique des
capsules micrométriques qui constituent des microréservoirs remplis d'un
produit actif (parfum ou déodorant ou hydratant ou antibactérien ou ….). Par
frottement ce produit est délivré et se répand hors du textile. Ce dispositif
résiste à plusieurs lavages et peut même être régénéré en le plongeant dans un
bain contenant de nouvelles microcapsules et de la colle.
Il a été imaginé des vêtements changeant de
couleur en fonction de la température (on est renseigné immédiatement sur la
fièvre éventuelle d'un nourrisson portant un tel vêtement).
Il a été imaginé aussi des vêtements
"isothermes" en remplissant les capsules d'une cire qui fond en
absorbant la chaleur extérieure en été et qui se solidifie par temps froid en
rendant une certaine quantité de chaleur.
11) Les textiles dits intelligents :
On
appelle textiles "intelligents", des textiles pouvant par exemple
détecter et analyser des modifications du milieu ambiant et réagir à ces
variations et même éventuellement les transmettre à distance.
On
trouve ainsi des vêtements capables de s'illuminer simplement en les touchant
et de changer d'aspect en fonction de l'éclairement.
Certains
textiles peuvent transformer de l'énergie lumineuse en énergie électrique et la
stocker ; d'autres sont dotés de mémoire et même d'apprentissage. Des montres
sont par exemple incorporées au tissu d'une chemise ….
Ces
réalisations sont devenues possibles dès qu'on a su intégrer de l'électronique
dans des textiles classiques (conducteurs, résistances, transistors, diodes,
cellules photovoltaïques, batteries).
- Un exemple : Un textile qui
s'illumine
On
tisse une fibre normale (tergal, nylon, polyacrylonitrile ….) avec une fibre
optique (annexe 1) très fine. On réunit l'ensemble des
fibres optiques pour qu'elles aient un point commun que l'on éclaire par une
led intégrée ou non au tissu. La lumière
canalisée par la fibre optique jaillit à l'extrémité de celle-ci.
Le
tissu peut être abrasé pour créer des petits trous le long de la fibre optique,
ce qui permet des sorties de lumière et un éclairement sensiblement uniforme du
textile.
Pour
que ce textile soit autonome, il faut ajouter un dispositif d'alimentation de
la led (par exemple une cellule photovoltaïque organique (annexe
2)) et une batterie pour stocker l'énergie produite par la cellule (annexe 3), ces éléments étant incorporés au tissu ; et si
on souhaite que ce textile s'illumine par exemple en réagissant au toucher, on
y adjoint un dispositif jouant le rôle d'interrupteur ; ça peut être un capteur
résistif sous forme de fils conducteurs tissés avec les autres fibres
permettant d'établir un contact électrique par pression comme le montre le
schéma ci-dessous :
Les applications du tissu lumineux ne
sont pas que ludiques ou décoratives.
Après avoir appliqué sur la peau une
crème photosensibilisante contenant un sensibilisateur comme par exemple
l'indocyanine green (ICG)
on attend que les cellules saines de
la zone aient éliminé ce composé (les cellules cancéreuses qui les éliminent moins
rapidement en contiennent encore) ; on applique alors un tissu éclairé par
laser sur la zone traitée, pour émettre de manière uniforme sur cette surface
une lumière de longueur d'onde précise.
Le sensibilisateur absorbe cette
lumière donne lieu à une émission de fluorescence ; l'énergie ainsi émise est
transmise à l'oxygène ambiant qui prend alors la forme d'oxygène singulet :
On écrit
L'oxygène singulet est un oxydant
très puissant, il détruit les cellules cancéreuses à son contact.
En outre, toujours dans un proche
avenir, ce tissu plongé dans des eaux sortant d'une station d'épuration pourra
aussi permettre, à température ambiante, d'éliminer des polluants ultimes
(traces de médicaments, pesticides…) que cette eau contient encore.
La frontière entre des textiles à
caractères très performants et les textiles fonctionnels, qui impliquent
l'association à d'autres supports, n'est pas toujours facile à concevoir. Le
Docteur Pierre Aldebert, Directeur de Recherche au CNRS dans sa chronique Des
textiles préhistoriques aux textiles
intelligents ou 10 000 ans d'histoire de l'homme habillé, écrit
"…Viennent ensuite les textiles communicants actifs dans le sens où sont
intégrés des capteurs divers dont les mesures sont transmises ailleurs. Il faut
mentionner à ce sujet une tenue de pompier qui va révolutionner leur sécurité
avec une veste qui se repère par GPS et en autonomie communique au poste de
commandement des mesures externes comme la température mais aussi internes grâce
à un gilet muni de capteurs biologiques fournissant données respiratoires et
cardiaques …".
Annexe
1 : Fibre optique
Une
fibre optique est une fibre transparente souple permettant de guider la lumière
d'une extrémité à l'autre sans qu'elle puisse sortir en chemin et ce quelle que
soit la forme que l'on donne à la fibre par déformation.
Le
phénomène physique qui régit ce comportement est la réflexion totale que subit
un rayon lumineux lorsqu'il circule dans un milieu homogène et isotrope
d'indice n1 et qu'il rencontre un milieu homogène et isotrope
d'indice n2 <n1. Ce rayon se réfléchit totalement sur
le dioptre formé par les deux milieux et est donc renvoyé dans le premier
milieu et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il parvienne à l'extrémité de la fibre
et il peut alors sortir.
Une
fibre optique est constituée de 3 cylindres concentriques
de
l'intérieur vers l'extérieur :
- Le cœur (de diamètre 8µm) en PMMA
(polyméthacrylate de méthyle)
où
entre et se propage la lumière.
- La gaine (125 µm) dont l'indice de
réfraction est inférieur à celui du cœur est constituée de couches alternées de
PMMA et de polystyrène (PS)
Elle
contient la lumière et l'empêche de sortir du cœur.
- Une protection mécanique (230µm)
des deux couches précédentes en PMMA.
Les
applications les plus connues des fibres optiques sont
- En médecine, les endoscopes
particulièrement utilisés en gastro-entérologie.
- Dans le domaine des
télécommunications pour la transmission d'informations dans les réseaux à haut
débit.
Annexe
2 : Cellules
photovoltaïques organiques (OPV)
Une
cellule photovoltaïque transforme l'énergie lumineuse qu'elle reçoit en une
tension électrique continue.
Deux
technologies existent, l'une assez ancienne, basée sur des semi-conducteurs
essentiellement à base de silicium (dite de première génération pour les
cellules rigides ou de deuxième génération pour les panneaux en couche mince et
éventuellement flexibles) et l'autre dite technologie souple ou flexible, plus
récente, basée sur les propriétés de certaines molécules organiques et désignée
par OPV (Organic PhotoVoltaics).
Ces
dernières sont étudiées depuis les années 1970, mais avec un intérêt plus
soutenu et un essor plus rapide à partir des années 1990.
On
associe un polymère par exemple le PCDTBT
ou le
P3HT (Poly(3-hexylthiophène)
et une molécule par exemple le PC70BM
les
deux premiers jouent le rôle de donneur d'électrons et la troisième d'accepteur
d'électrons, comme le montre le schéma de principe simplifié ci-dessous :
Le
rendement de ce type de cellules se situe entre 6% et 10%.
En
dépit d'un faible rendement, ces cellules possèdent quelques avantages par
rapport aux cellules à base de silicium :
¾
Elles correspondent à de faibles coûts
financiers et énergétiques.
¾
Elles ont un faible impact
environnemental.
¾
Elles peuvent s'intégrer facilement à
des structures souples ; on cite par exemple fréquemment la possibilité de les
intégrer à des toiles de tentes, structures placées généralement au soleil, qui
développent une grande surface et qui permettent de récupérer de l'énergie
alors que l'on est loin de toute autre source d'électricité.
On
procède par des techniques proches des techniques d'impression en incorporant
ces cellules dans des encres qu'on applique sur des supports plastiques.
On peut
les incorporer à des peintures que l'on sait enduire en couches très minces.
Les
vitres et les pare-brises de voitures constituent aussi des supports
intéressants.
Annexe
3 : Batteries à base
de polymères
Structure
simplifiée et matériaux utilisés
Comme
dans toute batterie deux "électrodes" et des électrolytes solides ;
l'ensemble est souple et constitué de polymères.
- L'anode est en oxyde de
polyéthylène ou polyéthylène glycol (PEO)
associé
à des électrolytes à base de titanate de lithium et du carbone.
- La cathode est en PEO associé à
des phosphates de fer et de lithium et du carbone.
- Entre les deux un électrolyte
constitué de PEO associé à de l'iodure de lithium.
Des
bandes assez étroites sont découpées et incorporées au textile et connectées
entre elles ; d'une part elles sont reliées aux cellules photovoltaïques
organiques souples qui leur apportent l'énergie électrique et les rechargent ; d'autre
part elles sont reliées aux led éventuelles ou à tout autre circuit ou
composant électronique à qui elles fournissent l'énergie électriques dont ils
ont besoin.