MATIERES COLORANTES ORGANIQUES

Jacques BARON


RETOUR AU SOMMAIRE


Plan de l’étude :

 

1)     Chromophores, auxochromes, adjuvants :

1-1)Chromophores

1-2) Auxochromes

1-3) Adjuvants

 

 

2)     Les azoïques :

2-1)  Synthèse 

2-2) Des indicateurs de pH

2-3) Des colorants alimentaires

2-4) Un indicateur de complexation

 

3)     Les dérivés du triphénylméthane :

3-1) La fuchsine

3-2) Le violet cristal

3-3) Le bleu patenté V

3-4) Le vert acide brillant

3-5) Le vert malachite

4)     Les phtaléines :

4-1) Phtaléine du phénol

4-2) Fluorescéine

4-3) Les rhodamines

4-4) Les sulfones phtaléines

 

5)     Les colorants quinoniques :

5-1) Naphtoquinones

5-2) Anthraquinones

5-3) Quinones imines

 

 

6)     Les colorants indigoïdes :

6-1) L’indigo

6-2) Le carmin d’indigo

6-3) Indigoïdes des pourpres et des murex

 

 

7)     Les colorants aziniques :

7-1) Thiaziniques

7-2) Oxaziniques

 

 

 

8)     Les caroténoïdes :

8-1) Les carotènes

8-2) Les xanthophylles

 

 

 

9)     Flavones et anthocyanes :

9-1) Les flavones

9-2) Les anthocyanes

 

 

 

10)   Colorants dus à des complexes :

10-1) L’ion cupritartrique

10-2) L’orthophénanthroline ferreuse

10-3) Colorants tétrapyrroliques

 

 

11)   D’autres colorants :

11-1) Des rouges

11-2) Des jaunes

11-3) Des noirs

11-4) Colorants au soufre

11-5) Des polyphénols


1)     Chromophores, auxochromes, adjuvants :

 

1-1) Chromophores :

 

Une absorption dans l’UV se rencontre chez les molécules renfermant des groupements chromophores :

COLORANT1.gif

S’il y a plusieurs chromophores et notamment si les doubles liaisons sont conjuguées COLORANT2.gif, l’absorption se déplace vers les grandes longueurs d’onde c’est-à-dire de l’UV dans le visible ; la molécule devient colorée (molécule chromogène) :

 

Exemple 

 Phtaléine du phénol  incolore à pH inférieur à 8 elle devient nettement rouge à pH 10.

 

PHIPHI2.gif

 

L’œil perçoit les radiations de la lumière blanche qui n’ont pas été absorbées.

 

1-2) Auxochromes :

 

Des groupes d’atomes fixés sur la molécule chromogène provoquent un accroissement de l’intensité de la couleur (effet hyperchrome) ou un déplacement de l’absorption vers les grandes longueurs d’onde (effet bathochrome, du grec bathos, “profondeur” et khrôma, “couleur”). Ce sont des auxochromes :

 

-OH,     -OR,     -NH2 et ses dérivés,     -R,     -X     …….

 

Exemple :

 

COLORANT3.gif

 

1-3) Adjuvants :

 

D’autres groupes favorisent la teinture parce qu’ils permettent la solubilité du colorant ou sa liaison avec un support. Ce sont les adjuvants : -SO3H,     -COOH,     -NH2,     …..

 

Exemple : le rouge Congo

 

C1.gif


 

2)  Les azoïques :         Ar-N=N-Ar’

 

Remarque : Ar et Ar’ sont à prendre au sens large ; il peut y avoir des substituants sur les noyaux aromatiques.

 

            2-1) Synthèse : la synthèse des composés azoïques s’effectue par copulation d’un diazoïque ou sel de diazonium, généralement un chlorure  COLORANT4.gif

 

·        Avec les phénols en milieu alcalin. C’est un H en para (à défaut en ortho) qui intervient.

 

Exemple :

JAUNEAZOPHENOL.jpg

Chlorure de benzène diazonium

Chlorure de phényldiazonium

Chlorure de diazobenzène

Phénol

4-Hydroxybenzène azobenzène

p-Hydroxybenzène azobenzène

Jaune d'azophénol

 

Remarque : par souci de simplification pour plus de clarté, cette réaction, qui a lieu en milieu basique, a été écrite avec C6H5-OH au lieu de C6H5-O- et le composé obtenu C6H5-N=N-C6H4-OH au lieu de C6H5-N=N-C6H4-O-.

 

Autres exemples :

-       La copulation du diazoïque de l’aniline avec l’α-naphtol conduit au brun organol :

BRUNORGANOL.gif

 

-       La copulation du diazoïque de l’aniline avec le β-naphtol conduit au jaune Soudan ou Sudan I ® :

 

SUDANI.gif

2-hydroxynaphtalène azobenzène

 

 

·        Avec les amines aromatiques en milieu acide (à pH aux environs de 5) ; l’acidité des copulants suffit le plus souvent.

 

Exemples :

 

-       La N,N-diméthylaniline et le diazoïque de l’acide sulfanilique (amine aromatique primaire) donnent l’hélianthine :

 

COLORANT25.gif

-       La N,N-diméthylaniline et le diazoïque de l’acide anthranilique , lui aussi amine aromatique primaire donnent le rouge de méthyle :

 

COLORANT9.gif

-       La copulation du bis-diazoïque de la benzidine avec l’acide naphthionique donne le rouge Congo :

 

C4.gif

 

En milieu basique :

 

C5.gif

 

 

Le rouge Congo, colorant bis-azoïque, a été préparé par Boettiger en 1884. Ces colorants, obtenus à partir de la benzidine  et d'autres diamines, représentèrent un réel progrès comme colorants pour tissus car ils permettaient de teindre directement le coton sans "mordant".

 

            2-2) Des indicateurs de pH :

 

Parmi les colorants azoïques, on trouve des indicateurs colorés de réactions acide-base très courants (en général sous forme de sel de sodium) :

-       L’hélianthine  rouge orangé à pH<3,2 et jaune à pH>4,4

 

COLORANT26.gif

 

-       le rouge de méthyle rouge à pH<4,4 et jaune pâle à pH>6,2

 

COLORANT13.gif

 

            2-3) Des colorants alimentaires :

 

On trouve aussi des colorants alimentaires parmi les colorants azoïques :

 

-       Le jaune E 102, la tartrazine :

 

Tartrazine.gif

-       L’orange E 110, le jaune orangé sunset (ou jaune orangé S ou jaune 6) ; il est aussi utilisé comme colorant de certains parfums.

 

C7.gif

-       Le rouge E 122, l’azorubine (ou carmoisine)

 

C8.gif

 

-       Le rouge E 123, l’azorubine S qui est un produit de synthèse :

 

C9.gif

2-4) Un Indicateur de complexation :

 

Le noir ériochrome T est un indicateur coloré de réactions de complexation :

 

C22.gif

 

Désignons par H2T le noir ériochrome T ; nous avons écrit :

 

 COLORANT16.gif

 

C’est vrai pour pH > 12 (T2- est rose orangé).

 

En pratique, l’indicateur est surtout utilisé à pH = 10 et dans ce cas :

 

COLORANTX.gif

 

Au départ, en présence de cation M2+ :

COLORANTSXXX.gif

 

En fin de dosage, les traces de M2+ qui avaient été captées sont libérées :

 

COLORANT19.gif

 

On observe un virage du rouge violacé au bleu.


 

 3)  Les dérivés du triphénylméthane :

 

COLORANT20.gif

3-1) La fuchsine : (du nom des chimistes industriels lyonnais, les frères Renard, la traduction du mot « renard » en allemand étant Fuchs).

S’obtient en oxydant par SnCl4 un mélange à parts égales d’aniline, d’o.et p. toluidines. C’est un indicateur d’oxydo-réduction :

 

COLORANT21.gif

 

Application : réactif de Schiff pour la détection des aldéhydes :

On décolore la fuchsine par NaHSO3 (qui joue le rôle de réducteur et qui déplace l’équilibre ci-dessus vers la gauche) et l’on obtient le réactif de Schiff. Celui-ci est coloré en violet par les aldéhydes.

Interprétation : Les aldéhydes se combinent à NaHSO3 (pour donner une « combinaison bisulfitique ») ce qui entraîne une évolution vers la droite (équation ci-dessus) ; on devrait retrouver la couleur rose mauve de départ, mais les aldéhydes donnent en outre, une réaction de condensation avec les groupes amine de la fuchsine :

COLORANT23.gif

ce qui fait que la couleur obtenue n’est pas exactement la couleur d’origine.

 

3-2) Le violet cristal (ou violet de méthyle 10B, ou violet basique 3) :

 

VIOLETDECRISTAL.gif

 

Remarque : On trouve également le violet de méthyle 6B :

 

VIOLET6B.gif   

et le violet de méthyle 2B :

 

VIOLET2B.gif

On s’aperçoit que la couleur devient de plus en plus violette au fur et à mesure que le nombre de groupes –CH3 augmente c'est-à-dire que le violet de méthyle 10B est plus violet que le violet de méthyle 6B lui-même plus violet que le violet de méthyle 2B. Le mélange de ces trois molécules correspond au violet de gentiane utilisé en microbiologie pour la coloration de Gram.

 

3-3) Le bleu patenté V : Colorant alimentaire répertorié sous le code E131, de couleur bleu cyan utilisé dans les boissons.

 

BLEUPATENTE.gif

La couleur verte du sirop de menthe du commerce est due à un mélange de tartrazine et de bleu patenté V.

 

 

3-4) Le vert acide brillant (ou vert S) colorant alimentaire E 142 est une molécule voisine :

 

C11.gif

 

3-5) Le vert malachite : très utilisé comme teinture

 

MALACHITE.gif


 

4) Les Phtaléines :

 

Ce sont des produits de condensation de l’anhydride phtalique avec les phénols.

 

4-1) Phtaléine du phénol : c’est un indicateur de pH

 

C23.gif

 

4-2) Fluorescéine :

 

En remplaçant le phénol par le résorcinol, il se produit une condensation supplémentaire et on obtient la fluorescéine ; c’est une poudre rouge qui donne une coloration « vert fluorescent » en solution dans l’eau.

 

FLUORESCEINE.gif

 

L’éosine est la tétrabromofluorescéine (antiseptique, colorant en biologie). C’est un colorant rouge.

 

COLORANT27.gif

L’érythrosine est la tétraiodofluorescéine (colorant alimentaire E127). C’est un colorant rouge.

 

E127

Le mercurochrome, un dérivé disodique de la dibromohydroxymercurifluorescéine, est un puissant antiseptique de couleur rouge, qui n’est plus commercialisé en France depuis 2006 :

 

COLORANT33.gif

 

4-3) Les rhodamines sont des phtaléines faites avec des m-aminophénols ; elles teignent bien le coton et la soie en rouge.

 

Exemple :

COLORANT28.gif

4-4) Les sulfones phtaléines :

 

L’anhydride phtalique

 COLORANT29.gif

 

est remplacé par l'anhydride o-sulfobenzoïque

 

COLORANT30bis.gif

 

et si le phénol utilisé est l’α-bromothymol 

 

COLORANT31.gif

 

on obtient la dibromothymol sulfone phtaléine qui est le bleu de bromothymol, un indicateur de pH (0<pH< 6  jaune ; 7,6<pH<14   bleu)

 

C14.gif

 


 

5) Les colorants quinoniques :

 

Ce sont des dérivés de la p-quinone :

pQUINONE.gif

Quelques exemples parmi les plus simples :

 

5-1) Naphtoquinones :

 

Le juglone est une molécule présente dans les feuilles et l’écorce du noyer (teinte brune) ; elle possède des propriétés antifongiques et antimicrobiennes :

 

COLORANT35.gif

 

Le lawsone est le principal colorant contenu dans les feuilles de henné (Lawsonia inermis), arbuste de quelques mètres de haut ; teinte brun-roux. Ce colorant sert surtout à teindre la peau et les cheveux :

 

COLORANT36.gif

 

5-2) Anthraquinones :

- L'alizarine

Pendant des siècles on a produit des vêtements teints avec un colorant, tiré de la racine de garance. La garance est une plante grimpante de la famille des rubiacés (Rubia tinctorium) autrefois cultivée dans le sud de la France pour  en tirer cette substance colorante dont le principal produit organique responsable de sa couleur est l'alizarine. Cette teinture est connue depuis l’antiquité ; l’archéologue britannique Carter découvre des textiles teints avec de la garance dans la tombe de Tout-Ankh-Amon (1330 environ avant-J.C)).

 

 

GARANCE.jpg

 

 

 

 

COLORANT37.gif

           alizarine

 

 

L’alizarine a été isolée de la garance pour la première fois, par Robiquet en 1826.
La synthèse de l'alizarine réalisée en 1868 par Graebe et Liebermann marqua la fin de la culture de la garance.

 

- Disperse violet 1 (1,4-diaminoanthraquinone)

DISPERSEVIOLET.gif

utilisé en teintures capillaires.

 

            5-3) Quinones imines :

Noyau

QUINONEIMINE.gif

Par action des p-phénylènediamines sur les phénols, on obtient des composés tels que :

COLOR53.gif

Avec R1 et R2 représentés par –C2H5, on a un colorant cyan utilisé en photographie.


 

6) Les colorants indigoïdes :

 

6-1) L’indigo :

 

L’association de deux molécules d’indoxyle avec déshydrogénation conduit à l’indigo :

 

COLORANT39.gif

Cette forme est colorée (remarquer le système de doubles liaisons conjuguées). La teinte indigo est intermédiaire entre le bleu et le violet.

Il est important de signaler la forme réduite, incolore, car c’est obligatoirement sous cette forme, soluble, que le produit se fixe sur les fibres textiles lorsqu’on l’utilise comme teinture.

 

COLORANT38.gif

 

L’indigo existe à l’état naturel dans les feuilles de pastel (Isatis tinctoria, une crucifère) sous forme d’hétéroside (à base de fructose) et dans les feuilles d’un arbuste des pays chauds, l’indigotier (Indigofera tinctoria , papilionacée) sous forme d’un autre hétéroside (à base de glucose).

L’hétéroside précurseur de l’indigo dans l’indigotier est l’indican ; le glucose est sous forme de β-D-glucopyranose et c’est le –OH porté par C1 qui est mis en jeu.

C15.gif

L’hétéroside précurseur de l’indigo dans le pastel est l’isatan B ; le fructose est sous forme de β-D-fructofuranose oxydé en C6 et c’est le –OH de ce carboxyle qui est mis en jeu.

 

COLORANT41.gif

 

On fait la synthèse de l’indigo :

·        à partir d’aniline et d’acide monochloracétique ou

·        à partir d’α nitrobenzaldéhyde et d’acétone.

 

Cette molécule s'avéra très difficile à synthétiser ; A.Baeyer mit dix ans pour en établir la constitution puis la synthétiser. C'est le procédé de Karl Heumann  (à partir d’aniline et d’acide monochloracétique) qui fut adopté pour la synthèse industrielle à grande échelle. C'est à partir de 1897 que l'indigo artificiel remplaça l'indigo naturel.

 

6-2) Le carmin d’indigo : de couleur très voisine correspond à l’acide 5-5’disulfonique de l’indigo (ou à son sel de disodium). C’est le colorant alimentaire référencé E132.

 

C16.gif

            6-3) Indigoïdes des pourpres et des murex : Certains gastéropodes (pourpres, murex) fournissent le 6,6'-dibromoindigo dont les rouges étaient très prisés dans l'Antiquité. On les trouve au bord des côtes, dans presque toutes les parties du monde.

Le colorant n'existe pas dans l'animal ; il y a un précurseur – comme pour les plantes à indigo – et l'union de deux molécules en présence d'oxygène engendre le colorant à la mort de l'animal.

DIBROMOINDIGO.gif


 

7) Les colorants aziniques :

 

7-1) Thiaziniques :

 

Ils renferment le noyau thiazine :

THIAZINE.gif

En pratique on a à faire à la dibenzothiazine :

COLORANT43.gif

 

Un dérivé azoté bien connu est le bleu de méthylène :

METHYLENEINCOLORE.gif

 

Le produit se colore au contact de l’oxygène de l’air. Appelons BMH le bleu de méthylène sous sa forme incolore,

H étant l'atome d'hydrogène fixé sur l'azote.

METHYLENE3.jpg

 

METHYLENE1.gif

 

Un remaniement électronique fait apparaître des doubles liaisons conjuguées (→ couleur).

Le soufre a alors cinq électrons périphériques d'où sa charge positive.

En se focalisant sur la partie concernée de la molécule, on peut envisager :

METHYLENE2.jpg

L'édifice étant chargé positivement, la neutralité du milieu peut être assurée par les ions OH- apparus.

 

7-2) Oxaziniques :

 

L’oxygène peut remplacer le soufre :

COLORANT48.gifet l’on a la dibenzoxazine ou « phénoxazine »

 

La formule calquée sur celle du bleu de méthylène donne le bleu de Capri :

 

BLEUCAPRI.gif

 

La dibenzoxazine est le noyau de base d’une formule complexe correspondant au colorant appelé « tournesol » qui s’obtient à partir de lichens à orseille, présents sur les rochers des mers un peu chaudes comme la Méditerranée, mais aussi dans les montagnes.


 

8) Les caroténoïdes :

 

Ce groupe comprend les carotènes et les xantophylles. Ils colorent en jaune, orange, exceptionnellement en rouge, la carotte, les abricots, le maïs, la citrouille, le safran, les œufs, la crème de lait, les crustacés cuits (rupture avec une protéine), les feuilles en automne, la tomate, etc….

Ils sont masqués par la chlorophylle dans les feuilles vertes.

8-1) Les carotènes :

 

·         Un carotène très répandu : le β-carotène ; il possède 40 carbones et deux cycles identiques :

C20.gif

Il est le précurseur de la vitamine A :

VITAMA

·         Il existe un α-carotène :

ACarotene

Le cycle de gauche est légèrement différent ; sa double liaison n’est pas placée au même endroit.

 

·         Enfin on peut ajouter le lycopène, toujours en C 40 mais dépourvu de cycle :

 

LYCOPENE

Les carotènes sont rouges. La tomate renferme plus spécialement du lycopène.

 

8-2) Les xanthophylles  (du grec xanthon = jaune  et phullon = feuille)

 

Ce sont des pigments jaunes, dérivés oxygénés des carotènes :

 

·         Zéaxanthine (zéa : pour maïs)

ZEAXANTHINE2

Cette molécule ressemble à celle du β-carotène ; un groupe hydroxyle (-OH) remplace un hydrogène dans chacun des deux cycles.

 

·         Lutéine du latin luteum = jaune (nom)

 

Cette molécule est présente dans de nombreux légumes à feuilles vertes (brocolis, chou vert, épinards, petits pois, endives crues....) mais aussi dans les algues vertes et rouges, le maïs, le jaune d'oeuf, le jus d'orange ; elle n’est pas synthétisée par l'organisme. Son action antioxydante et son rôle de filtre de la lumière bleue, semblent protéger des UV, certaines molécules sensibles des cellules végétales  .
Dans l'organisme humain elle semble avoir un rôle retardateur du vieillissement oculaire. On en retrouve ainsi que la zéaxanthine au niveau de la macula; elle est surtout localisée dans les cellules périphériques de celle-ci.
C'est un pigment orangé.

 

LUTEINE2

Cette molécule ressemble à celle de l’α-carotène ; un groupe hydroxyle (-OH) remplace un hydrogène dans chacun des deux cycles.

 

·         Astaxanthine (en zoologie astacus = écrevisse)

 

ASTAXANTHINE

Cette molécule existe naturellement chez les salmonidés, les crabes, les crevettes, les homards et les langoustes, les langoustines, les écrevisses, en même temps que d'autres caroténoïdes (canthaxanthine...). A la cuisson, la protéine qui entoure l'astaxanthine la libère et cette molécule donne à ces poissons et à ces crustacés une couleur rose.

 

·         La crocétine :

 

Cette molécule existe dans la fleur de safran (Crocus sativus L.).

 

COLORANT51.gif

 


9) Flavones et anthocyanes :

 

Les noyaux suivants se retrouvent dans les colorants naturels que sont les flavones et les anthocyanes :

 

COLORANT72.gif

ANTHOCOLORANTS.jpg

 

 

            9-1) Les flavones du latin flavus = jaune (adjectif)

 

Ce sont des pigments qui colorent les fleurs en jaune. Il en existe une grande variété qui diffèrent par la nature et la place des substituants –OH et –OR sur les noyaux.

Exemples :

·         La lutéoline du latin luteum = jaune (nom) des fleurs de réséda (reseda luteola)

COLORANT73.gif

·         La quercétine du bois du chêne tinctorial (chêne quercitron)

COLORANT74.gif

 

9-2) Les anthocyanes :

 

Les anthocyanes forment une gamme très étendue de bleus et de rouges, colorant les fleurs et les fruits. Les différences de substituants sur les noyaux, ne suffisent pas à expliquer ces différences de teintes ; ces composés sont très sensibles au pH.

Prenons l’exemple de la cyanidine, extrêmement répandue : bleuet, coquelicot, cerise, fraise, framboise, ….. :

C25.gif

 

On comprend alors pourquoi elle donne une couleur bleue au bleuet qui a une sève alcaline et une couleur rouge au coquelicot qui a une sève acide.

Une fleur ou un fruit peut contenir un mélange d’anthocyanes. Ainsi le géranium contient de la pelargonidine :

COLORANT76.gif

La fraise, elle, contient de la cyanidine et de la pelargonidine.


 

10) Colorants dus à des complexes :

 

Citons quelques exemples :

 

            10-1) L’ion cupritartrique (ou tartrate cuivrique ou ditartratocuivre(II)) bleu foncé est celui de la liqueur de Fehling :

 

COLORANT56.gif

En enlevant un ion H+ à chaque OH des groupes carboxyles de l’acide tartrique,

COLORANT77.gif

et l’un quelconque des trois doublets de l’oxygène peut être cédé à Cu2+.

 

10-2) L’orthophénanthroline ferreuse : c’est le tri(1,10-phénanthroline)fer II

 

COLORANT59.gif

Ce complexe de coloration rouge est stable dans un domaine de pH allant de 2 à 9. Il permet un dosage spectrophotométrique des ions fer (II) dans le visible (510 nm).

On peut également doser les ions Fe(II) complexés par l’orthophénanthroline, par les ions dichromate, la demi-équation rédox des ions fer(II) complexés étant :

COLORANT78.gif

 

10-3) Colorants tétrapyrroliques :

 

Le squelette fondamental est constitué de quatre noyaux pyrrole reliés en cycle,

 

NOYTETRAPYRR.gif

-       Le noyau tétrapyrrolique est plan, il constitue (sans atome métallique au centre) une structure dite porphyrine, il est alors muni de chaînes latérales. Avec certains ions métalliques fixés au centre, on obtient des colorants ; notamment deux colorants universellement connus :

 

·         Mg2+    c’est la chlorophylle, pigment vert ; grâce à lui, les plantes captent l’énergie lumineuse nécessaire à l’élaboration des tissus végétaux.

 

Il existe trois molécules de chlorophylle : a ou α (C55H72MgN4O5), b ou β (C55H70MgN4O6), d ou d (C54H70MgN4O6).

 

CHLOROPHYLLE.gif

 

Les grains de chlorophylle, disséminés dans la cellule végétale sont appelés « chloroplastes ».

 

·         Fe2+   C’est l’hémoglobine ; pigment de couleur rouge.

 

L’hémoglobine est constituée d’un noyau (hème), le pigment, associé à une protéine (globine) ; la globine est entourée de quatre hèmes :

Noyau hème :

 

HEMOGLOBINE45.gif

 

L’hémoglobine est le pigment respiratoire des vertébrés ; c’est la nature de la globine qui change suivant les espèces. Chez l’homme la globine est constituée de quatre chaînes polypeptidiques, deux chaînes comprenant 141 acides aminés et deux chaînes 146 acides aminés.

Dans le transport d’oxygène, Fe2+ n’est pas oxydé en Fe3+, La molécule O2 se fixe latéralement sur le fer, au milieu du cycle.

La molécule CO, comparable, peut malheureusement se fixer à sa place dans l’asphyxie à l’oxyde de carbone.

Remarque :

Le pigment (noyau hème) est rattaché à la chaîne polypeptidique au niveau de l’un de ses acides aminés, l’histidine :

SPhistid

Le fer possède donc 6 liaisons ainsi que le montre le schéma suivant :

 

COLORANTS103.gif

 

-       Si sur le noyau tétrapyrrolique, les chaînes latérales sont remplacées par des noyaux benzène, on a le noyau tétrabenzopyrrolique, et si on intercale un atome d’azote sur les liaisons qui relient les 4 noyaux  et que l’on ajoute un ion cuivre (II) au centre, on obtient un pigment bleu : la phtalocyanine au cuivre,

 

PHTALOCU.gif

 

Ce pigment organique bleu (cyan) appartenant à la famille des tétraazatétrabenzoporphyrines est utilisé notamment pour les encres d’imprimerie ; on s’en sert également en peinture..
Cette molécule peut être obtenue par condensation de 4 molécules de phtalonitrile:
PHTALONITRILE

en présence de cuivre métal à 200°C.

Mais sa préparation la plus courante fait intervenir de l’anhydride phtalique, de l’urée et un oxyde métallique.

 

Remarque :

Il existe des pigments tétrapyrroliques linéaires (non cycliques). C’est le cas des phycobilines :

phycocyanobiline (bleue) et phycoérythrobiline (rouge) présentes toutes les deux dans les rhodophycées (algues rouges) et dans les cyanobactéries (anciennement "algues bleues") et participant à la photosynthèse à côté de la chlorophylle.

Ces phytobilines sont des groupements prosthétiques d'hétéroprotéines, les associations ainsi réalisées portent le nom de phycocyanine et phycoérythrine.

Formule de la phycocyanobiline :

 

PHYCOCYANOBILINE.gif

 

La formule de la phycoérythrobiline ne différe de la précédente que par une légère modification au niveau du quatrième noyau, à droite :

COLORPHYTOERYTHROB.gif


11) D’autres colorants :

 

En regroupant les colorants organiques en 10 classes, nous n’avons pas eu l’occasion d’aborder des colorants parfois importants mais difficiles à classer (cas isolés, molécules d’une grande complexité, …..)

 

            11-1) Des rouges :

 

-       Le rouge de betterave est de la bétacyanine, hétéroside de la bétanidine :

 

C19.gif

Il constitue environ 90% du colorant rouge de la betterave (Beta vulgaris L.var.rubra). C’est un des rares colorants rouges naturels qui n’est pas anthocyane. On trouve également ce colorant dans la figue de barbarie.

C’est un colorant alimentaire noté E 162, qui est parfaitement toléré par l’organisme (non toxique) et partiellement rejeté dans les urines.

 

-       Colorants des « bois rouges :

 

Donnons deux exemples

BRAZIL.gif

 

HEMAT.gif

 

Molécules qui se forment par oxydation spontanée à l'air, des substances majeures des "bois rouges solubles" : bois du Brésil et notamment de Pernambouc, bois de Campêche (la plus vieille ville espagnole connue du Yucatan au Mexique). Les molécules extraites sont incolores et en quelques heures se transforment en braziléine de couleur rouge foncé ou en hématéine de couleur jaune puis rouge puis noire (voir colorants noirs). Elles servaient autrefois à fabriquer les laques rouges utilisées par les artistes peintres.
Ces bois qui donnaient des substances de couleur braise sont à l'origine du nom du pays Brésil.

Le bois de Santal doit sa couleur rouge à un mélange de substances de formules apparentées aux précédentes, mais plus complexes : les santalines et les santarubines.
Le bois de Campêche appelé aussi campêche est un bois lourd et dur, riche en tanins, arbre du genre Hematoxylum (césalpiniacées).

 

            11-2) Des jaunes :

 

-       L’acide picrique :

 

ACIDEPICRIQUE

est un colorant jaune, très important en teinture.

 

-       La curcumine :

 

CURCUMACOL.gif

 

issue du rhizome du curcuma. C’est le colorant alimentaire E100.

 

-       La gentisine :

 

GENTISINE.gif

 

C'est une xanthone qu'on peut extraire de la racine de gentiane jaune (Gentiana lutea) appelée aussi grande gentiane ou gentiane d'or que l'on trouve notamment en Auvergne et dont on utilise la racine pour fabriquer des boissons alcoolisées (Suze, Avèze …).

 

11-3) Des noirs :

 

Les teintes noires sont d’origines diverses :

 

-       L’aniline sous l’effet d’oxydants (ClO3-, Cr2O72-…) donne de beaux « noirs d’aniline ».

Une des structures possibles :
NOIRANILINE
Une autre structure avancée:
ANILINENOIRE
Pour teindre les vêtements on imprègne la fibre d'une solution chlorhydrique d'aniline puis on oxyde avec du chlorate de sodium ou de potassium, et finalement avec du dichromate de sodium.

 

-       L’hématoxyline dont la formule a été donnée ci-dessus (colorants rouges) peut s’oxyder à l’air pour donner de l’hématéine de couleur noire.

 

            11-4) Colorants au soufre :

Ce sont des matières colorantes obtenues par chauffage de composés à noyau benzène diversement substitués (amines, dérivés nitrés, phénols, ….) ou de composés hétérocycliques le plus souvent azotés en présence de soufre ou de polysulfures alcalins.

On peut obtenir diverses teintes : noir, brun, rouge sombre, jaune, ….

La structure des colorants obtenus est généralement encore mal connue. Il peut y avoir des atomes de soufre dans des noyaux, par exemple

les noyaux  thiazole

et  dibenzothiazinone

                THIAZOLE.gif

DIBENZOTHIAZINONE.gif

ou dans des chaînes comme R-S-S-R'.

C'est pourquoi ces produits sont désignés en citant les molécules qui ont servi de point de départ.

 

SULFURBLACK11.gif

 

SULFURBROWN121.gif

            11-5) Des polyphénols :

Les polyphénols sous forme de tanins, donnent des beiges, des marrons, des gris, des noirs.

Donnons comme exemple de pigment naturel polyphénol, le gossypol, qui a un rôle biologique.

C’est un pigment jaune, extrait de la graine du cotonnier (Gossypium – Malvaceae). Cette molécule est un inhibiteur de plusieurs enzymes déshydrogénase. Des recherches sur ses propriétés contraceptives (masculines) ont été faites en Chine. On l’a longtemps utilisé contre la malaria.

 

C26.gif