FERMENTATIONS
1) Définition
:
Les fermentations résultent de l'action d'enzymes microbiennes sur un substrat organique.
Ces réactions biologiques qui dégradent le substrat sont des réactions
d'oxydo-réduction se produisant à l'abri de l'air (anaérobiose) et qui dégagent
peu d'énergie.
2) Fermentations et alimentation :
L'homme a mis à profit les phénomènes de fermentation pour conserver certains
aliments et en transformer d'autres en améliorant leurs qualités
nutritionnelles ou organoleptiques*.
De très nombreux aliments fermentés existent actuellement (plusieurs milliers)
parmi lesquels pêle-mêle : yaourts, fromages, saucisson, choucroute, pain, vin,
cidre, bière mais aussi cacao, thé, café pour ne citer que quelques aliments
courants dans nos régions.
2-1) Quelques types de
fermentation dans l'alimentation :
Suivant la nature des produits issus de la réaction enzymatique, on distingue
plusieurs types de fermentation :
- Fermentation lactique :
Il se forme de l'acide lactique à partir du
glucose.
L'acide lactique ayant comme formule semi-développée :
Remarque : La fermentation malolactique
est un cas particulier, l'acide lactique se formant au détriment de l'acide malique
qui donne à un vin par exemple une acidité ("sa verdeur") la plupart
du temps non souhaitée (vins rouges de qualité).
- Fermentation alcoolique
: Il se forme de l'éthanol à partir du glucose.
- Fermentation acétique
:Il se forme de l'acide éthanoïque à partir de l'éthanol.
Remarquons que cette fermentation est aérobie, l'oxydation nécessitant l'oxygène
de l'air pour avoir lieu.
- Fermentation propionique
: De l'acide propanoïque , de l'acide
éthanoïque ainsi que du CO2 et du dihydrogène se forment.
- Fermentation
butyrique : Il se forme de l'acide butanoïque,
du CO2 et du dihydrogène à partir de l'acide lactique déjà
formé par fermentation lactique :
2-2) Quelques applications des différentes fermentations - Les microorganismes utilisés :
- Fermentation lactique :
Elle intervient dans l'élaboration des yaourts, des laits fermentés, des
saucissons, de la choucroute, du levain pour le pain, de certains fromages.
Elle est homolactique quand sous l'action de bactéries homofermentaires
l'acide lactique est majoritaire.
Parmi les bactéries homofermentaires des bactéries des genres Lactococcus,
Lactobacillus et Streptococcus.
Elle est hétérolactique quand sous l'action de bactéries hétérofermentaires
on obtient de l'acide lactique et d'autres produits, éthanol, acide
éthanoïque, dioxyde de carbone.
Parmi les bactéries hétérofermentaires des bactéries des genres Leuconostoc et
certains Lactobacillus.
- Fermentation malolactique
:
La gestion de la fermentation malolactique est un des axes majeurs du travail
du vin.
Elle est recherchée dans la vinification des vins rouges et au contraire évitée
pour les vins blancs et rosés pour lesquels on souhaite garder l'acidité
apportée par l'acide malique.
Les bactéries utilisées sont du genre Oenococcus (Oenococcus oeni par
exemple).
- Fermentation alcoolique :
L'éthanol de l'ensemble des boissons alcoolisées provient de la fermentation du
glucose apporté par les plantes, sous l'effet de la zymase, une enzyme produite
par des levures (levure de bière : Saccharomyces cerevisiae, Candida utilis,
des champignons microscopiques).
Les solutions glucosées aqueuses qui contiennent plus de 100 à 250g de sucre
par litre, ne fermentent plus. Les solutions que l'on obtient peuvent atteindre
une concentration maximale en alcool de 15% en volume ; un taux plus important
empêcherait la fermentation.
Les plantes ne contiennent, pour la plupart, que peu de glucose, car elles
transforment un excédent de cette substance d’assimilation en amidon insoluble
; cet amidon est stocké dans la graine et transformé en sucre lors de la
germination par l’enzyme amylase et il est ainsi disponible pour la plante mais
aussi pour la fermentation alcoolique.
On appelle l’orge germé, du malt, qui est la matière bien connue servant à la
fabrication de la bière.
Le whisky écossais provient de l’orge et le whisky canadien, du maïs.
On utilise pour la fermentation alcoolique, en complément du malt, de l’amidon
de pomme de terre.
On utilise fréquemment pour obtenir des eaux-de-vie des fruits à pépins ou à
noyaux comme par exemple la prune, la cerise, la pomme et la poire.
- Fermentation acétique :
C'est à Louis Pasteur (1808-1873) que nous devons la découverte de la nature
biochimique du processus de formation du vinaigre. A partir de 1865, sur la
base des recherches de Pasteur, la production industrielle de vinaigre a connu
un grand essor. La bactérie du vinaigre "aceto-bacter" se développe
dans le vin non bouché. Les petites mouches qui sont fortement attirées par le
vin placé à l'air libre et qu'on appelle mouches du vinaigre (drosophiles)
véhiculent l'aceto-bacter. Les bactéries de l'acide acétique forment une couche
à la surface que l'on appelle la mère du vinaigre. L'aceto-bacter utilise pour
vivre l'énergie libérée par l'oxydation. Les processus qui ont lieu en présence
d'oxygène de l'air sont dits aérobies. Toute solution alcoolique diluée peut
donner de l'acide acétique ; dans ce cas le taux d'alcool correspond à la
quantité d'acide acétique qui résultera de la transformation.
- Fermentation propionique
:
L'acide propionique (ou propanoïque) et l'acide éthanoïque sont responsables de
la flaveur des fromages à pâte cuite et le gaz carbonique responsable de
l'ouverture de ces fromages (Comté, Gruyère et Emmental).
Les bactéries qui produisent ce type de fermentation sont les bactéries
propioniques ( genre Propionibacterium).
- Fermentation butyrique :
L'acide butyrique est responsable de l'odeur putride et du goût piquant de
certains fromages à pâte cuite.
Cette fermentation a lieu sous l'effet des bactéries Clostridium butyricum
.
3) Les fermentations dans l'industrie non alimentaire :
3-1) Les
biocarburants :
Trois procédés :
- On extrait de la betterave à sucre ou de la canne à sucre, des jus sucrés que
l'on fait fermenter.
- On extrait des matières amylacées (amidon...) de céréales (froment, maïs).
Ces matières sont hydrolysées en milieu acide pour obtenir du glucose que l'on
fait fermenter.
- D’un point de vue chimique on peut, dans des conditions très particulières,
parvenir à transformer du bois (matières
ligno-cellulosiques) en sucres fermentescibles, comme le fait par exemple la
Suède. Cette technique est encore sujet de recherches.
L'éthanol et l'ETBE qui peut en dériver sont de bons carburants (Pouvoir calorifique élevé : 21700kJ/kg pour l'éthanol, 28900kJ/kg pour l'ETBE contre 35600kJ/kg pour l'isooctane). On les mélange à l'essence (5% d'éthanol dans le biocarburant commercialisé en France, 15% d'ETBE dans le biocarburant commercialisé dans le reste de l'Europe). Jusqu'à 20% d'éthanol, les moteurs classiques fonctionnent sans problème, au delà une adaptation de ces moteurs est nécessaire.
3-2) Les polymères dégradables
:
Une industrie des polymères dégradables se développe dans l'optique d'un
développement durable, à partir de monomères ou de synthons obtenus par fermentation.
On prépare ainsi les polymères :
- PLA , poly(lactide) utilisé notamment en chirurgie pour des implants. Le polymère qui se déforme dès 50°C, est dégradable dans l'organisme par hydrolyse des fonctions esters, les métabolites naturels étant l'acide lactique et l'acide glycolique, le terme ultime de la dégradation étant CO2 et H2O. Le monomère est l'acide lactique obtenu par fermentation lactique du D-glucose issu de l'amidon de maïs.
- SORONA ®, polyester obtenu
par polymérisation du propane-1,3-diol (ou PDO) avec l'acide téréphtalique ou
TPA, est utilisé pour fabriquer des pièces d'automobiles ou des textiles
de hautes performances.
On l'utilise aussi en cosmétologie.
On peut produire le PDO à partir du glucose (obtenu souvent à partir de
l'amidon de maïs) fermenté par une bactérie (non pathogène) génétiquement
modifiée. On peut aussi l'obtenir par fermentation du glycérol industriel non
raffiné (sous-produit de la production industrielle de biodiesel) suivie d'une
étape de purification.
Le PDO est un synthon à 3 carbones, base de départ de nombreuses synthèses.
- PBS (PolyButylène Succinate
: Acide succinique et butanediol) et PBSA ( PolyButylène
Succinate Adipate : Acide succinique, acide adipique et butanediol ).
Ce sont des polyesters biodégradables obtenus à partir de l'acide succinique,
qu'on peut produire à partir du glucose (provenant de l'amidon de blé, de maïs
ou de résidus ligno-cellulosiques ou provenant des sucres de la canne à sucre
ou de la betterave) par métabolisme bactérien (fermentation) ; Actinobacillus
succinogenes, Mannheimia succiniproducens mais aussi Escherichia
Coli sont les principales bactéries utilisées.
L'acide succinique est un synthon à 4 carbones, base de départ de nombreuses
synthèses.
*caractère
d'un produit pouvant être apprécié par les sens humains : toucher, saveur,
odorat....